L’Ethnocentrisme ; incidences politiques et politique de l’emploi dans la culture Guinéenne

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À la demande de Abdoulaye Sacko…

Jamais ce terme n’a été aussi présent et pesant dans les mentalités des citoyens Guinéens qu’avec l’avènement, du numérique et la célérité avec laquelle voyage l’information.

De nombreuses définitions ont été données par biens de gens éclairées qu’elles varient comme l’exige le champ lexical pluriel de la science, d’un contributeur à l’autre. Confrontation des idées. Inspiration et perfectionnement d’un essai de l’autre. Critiques des analyses, analyse critique.

Je puis me permettre de m’introduire parmi cette perle de lumières, réduire l’effet par cette contribution, certes dégradante du  »tout », mais nécessaire à consolider par mes bêtises les vérités de mes prédécesseurs.

D’entrée en matière, il est nécessaire de faire précision que cette analyse n’est point d’un sociologue. Cependant, si la sociologie se définit par l’étude des phénomènes sociaux et des relations humaines, je m’autoproclame apprenti sorcier sur la base de l’observation des faits et de leurs justes appréciations.

Qu’est-ce donc L’Ethnocentrisme au delà de la simple définition académique ?

Qu’en est-il du cas Guinéen ? Autrement dit, sommes-nous (devenus) ethnocentristes ?

Et qu’en est-il des réalités professionnelles notamment, à travers les méthodes de recrutement tant dans les administrations publiques que dans les secteurs privés ?

William Graham Summer cet anthropologue père de la notion de l’ethnocentrisme la définit comme la propension de l’individu à faire de notre groupe ethnique le centre de toute chose.

A cela, il ajoute que chaque groupe pense que sa propre culture est la plus bonne. S’il observe que d’autres groupes ont des cultures rivalisantes, cela provoque son dédain.

A mes lecteurs je demande solennellement de relire et de saisir le paragraphe du père de l’ethnocentrisme car il plante déjà le décor de la situation Guinéenne.

Il nous est donc permis cette extrapolation par déduction que L’Ethnocentrisme est l’égocentrisme au stade embryonnaire. Cette propension à toujours ramener à soi le  »je » et à son groupe ethnique le »notre ».

Aussi il nous faut dénoncer avec justesse l’inconscience qui caractérise l’ethnocentriste dans sa préférence ethnique, car il dénote d’un état de nature. C’est ce que le psychanalyste Freud disait de la prééminence naturelle du moi sur le surmoi, c’est à dire notre stature défensive instinctive qui détermine notre personnalité, plutôt que le sens critique qui pousse l’être à l’objectivité.

En Guinée, à l’instar de nombreux pays africain, le pluriculturalisme qui caractérise notre société ouvre des brèches favorables au repli identitaire. Une situation bien entretenue par une histoire politique chaotique à travers laquelle l’ethnie a le plus souvent été mise à rude épreuve. Brandir au forceps le fanion ethnique pour assouvir des desseins individuels. Stratégie politique.

L’exemple le plus probant est les propos ethniques incendiaires et discriminatoires utilisés par certains leaders politiques en toute occurrence, tout au long des présidentielles récentes. NON ! Ceci n’est pas la cause. Elle en est une conséquence car les auteurs, conscients des dissensions existantes jouent la figure de proue en faisant de la récupération électoraliste.

Je me défends et vous épargne de la genèse de l’exacerbation de la défiance ethnique dans notre pays. L’histoire nous a pleinement enseigné sur les divers conflits ethniques depuis le complot dit peul du premier régime. Aux récents événements en 2013 et 2018 entre Guerzé et alliés contre Konianké et assimilés en région forestière, nous associons ceux des soussous contre malinkés et autre remake peul malinké actuel. Ceci n’est que la courte liste.

C’est donc raisonnable de comprendre que la déliquescence de l’unité nationale au profit de l’unité ethnique est principalement le fait de la politique et de ses corollaires.

Coutumièrement, nos sociétés étaient culturellement accueillantes envers l’étranger. Une acculturation qui a permis aux peuples de se cosmopolitiser en nouant des alliances autant par les mariages que par des pactes. Ainsi, un Camara se poularise et un Diallo se malinkanise.

Au demeurant, la morale exigeait de l’hôte assurance et protection envers le nouveau venu. Ainsi se constitua la diversité culturo ethnique, jusqu’au nombreux brassages qui fondent notre peuplade.

Ainsi apparaît donc L’état …

J’oppose aux relents naturels des individus à surestimer leur culture au détriment d’autres comme le définit William G. Summer, la notion de nation qui vient ici suppléer de nouvelles valeurs, dans ce que la pluralité ethnique est en réalité synonymique d’unicité plurielle, qui fait richesse et gloire.

Malheureusement il nous est donné de constater cette absence. Plus grand est l’écart qui sépare l’instauration d’une politique nationaliste voulue par l’état, plus grand sera le faussé qui alimentera la préférence ethnique.

La responsabilité de l’Etat dans le langage ethnique et la division qui sied est stratosphérique. Loin de faire son procès, il convient de noter que les régimes successifs ont manqué de courage politique, tantôt dans la dénonciation de crimes successifs, tantôt dans l’application d’une justice équitable. Pis, ils constituèrent les vecteurs par lesquels les différences s’illuminaient. Créant de facto le mépris de  »tout ceux qui ne sont pas nous », avec pour dérivé cette interprétation approximative,  »sont contre nous ».

Le Guinéen est-il (devenu) Ethnocentriste ?

A la lumière de cette question, il convient de faire preuve de beaucoup de prudence.

Je suis tenté de répondre par l’affirmative. Mais comme je lai mentionné plus haut, L’Ethnocentrisme Guinéen s’il y’a lieu de le dire est le fait du politique dans la manipulation et l’utilisation de la masse populaire. Cependant cet Ethnocentrisme n’est point structurel.

Certes les émotions et les ressentiments sont individuels donc incontrôlables par qui le porte, il est juste et sans équivoque qu’en Guinée, il n’existe pas de foulaphobie, de malinkaphobie ni de soussouphobie, encore moins de Kissiphobie…

Pour mieux me saisir, je vous renvoie aux haines multiséculaires qu’entretiennent certains peuples du monde. A l’instar des dogons et des peuls, des Haoussas et des Ibos, des hutus et des tutsis…

Alors pourquoi autant de mépris ethnique ?

Sur l’abondante littérature que je relate ici, deux concepts entretiennent une complémentarité entraînant cet état de fait.

Premièrement, c’est le concept des approches dynamiques, c’est a dire la combinaison des perspectives politiques et sociales. L’ethnie est appréhendée selon une approche bijective . Ayant pour élément de base, la ressemblance. Fictive ou réelle, il se développe une logique d’instrumentalisation qui renforce la conscience de groupe. C’est le syllogisme Abécédaire selon lequel si A=B et que B=C, c’est que A=C.

Nous voyons en notre groupe une solution (politique). Il nous faut juste trouver un représentant qui puisse tenir l’étendard.

Hors Mr X est de notre groupe. Ainsi il demeure la solution

Qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, l’ethnie y est saisie à la fois comme une substance pour aboutir à une finalité.

Le concept second est celui statique, qu’engendre in situ le premier

Nonobstant, il n’est point criminel dans ses différentes dimensions d’opter à un tel choix sur quelques base subjectives, puisque la politique elle-même admet la formation des familles politiques. Qu’elles soit ethniques, régionalistes, religieuses ou idéologiques, les gens s’acoquinent toujours au gré de leurs intérêts bon gré mal gré.

Par exemple, le Texas vote Républicain 90 fois sur 100.

Jamais un flamand n’en voudra aux wallons pour l’absence de leur vote quand il se trouve opposé à un des leurs. Aussi dire que la Catalogne qui demande sécession ne le fait pas pure haine des autres, si ce n’est par respect des différences. Le nord vote pour le nord et le sud pour le sud. Tel est notre culture politique qui justifie notre appartenance culturelle, cultuelle et environnementale.

C’est donc fort logique que l’appartenance a une communauté crée substantiellement le choix pour elle. On puit donc conclure sur cette base démonstrative que si L’Ethnocentrisme est rejet et haine de l’autre, NON la Guinée ne l’est pas… mais si elle détermine à partir de facteurs endogènes le repli identitaire et communautaire, sans risque de nous tromper, nous répondons affirmativement.

Quoiqu’il faut être très prudent car si au regard de la première la Guinée ne l’est pas ainsi considérée, il convient de dire qu’elle s’ethnocentrise step by step.

Enfin mettons au scanner de la profession et de l’emploi, ce corpus de L’Ethnocentrisme.

Le constat qui en ressort est alarmant car aussitôt il sonne le glas de la disparité et de la ségrégation, défiant ainsi nos lois et nos codes de conduite.

Si L’Ethnocentrisme en politique est considéré comme tolérable, c’est parce qu’aucune loi ne l’interdit. Ensuite, c’est qu’il est abstrait et non mesurable.

Cependant la législation est claire et formelle sur l’égalité des chances en milieu professionnel avec la mention que nul ne doit être discriminé pour des raisons de sexe de religion et d’appartenance ethnique.

A cette formule, j’oppose la responsabilité de l’État qui le premier enfreint son propre code en institutionnalisant dans le code minier la règle des quotas dans le recrutement de la main-d’œuvre.

Cela dit, un Guinéen du nord en quête d’emploi dans le sud devient un sous-guinéen de fait, face à un sudiste.

Vous conviendrez avec moi que cette loi est discriminatoire, abjecte et inopportune si l’on devait se tenir primo, au préambule de notre constitution (selon la loi des hommes) et secundo, à la répartition inégale des richesses que Dieu dans sa magnanimité a bien voulu nous faire don.

La Moyenne Guinée qui dispose de peu de ressources minières verra donc ses fils lésés.

En effet, l’environnement minier n’est que l’épiphénomène puisque le phénomène existait déjà dans notre administration.

De secteur en secteur, tout change, tout se déplace au gré des rois et des faiseurs de roi.

Elle commence par les nominations aux ministères.

Priorité est donnée plus à son groupe ethnique qu’à sa famille politique d’abord.

En effet, le fossé est presqu’inexistant puisque le premier constitue le second.

Ensuite les ministres ratissent l’ancienne équipe et installe les leurs. Directeurs nationaux, Directeurs généraux des EPA et EPI, Conseille de cabinet, Chefs de département, chefs de divisions…Priorité est encore donnée à son groupe ethnique mais cette fois, pas forcément à sa famille politique.

Retenons que un seul corps de métier est la chasse gardée du président himself… L’armée !

Il se réaménage et prend l’ossature ethnique de qui tient le sceptre.

A titre illustratif, rappelez vous de l’armée, de la région forestière et de Dadis sous son magistère.

Et pour un secret de polichinelle, la rareté des poulars dans ce corps professionnel n’a à strictement parlé aucun rapport avec leur forme frêle doublé d’indolence, c’est tout simplement qu’un peul n’a jamais été président et que contrairement aux autres ethnies, ils sont les sérieux prétendants en gestation au trône.

Le monde des affaires dans le secteur privé s’est autant gangrené qu’il pourrait chiper la vedette au public.

Clientélisme et Népotisme sont monnaies courantes. L’ethnie est le premier critère de recrutement au sens où, quand vous vous nommez Keita, Condé, Niankoye ou Touré, il vous serait une agréable perte de temps que d’aller en quête d’emplois à Orabank, à FiBank, à Orange Guinée et bien d’autres Entreprises, gîte des peuls.

Diamond Cement du célèbre Dankote, Guiter SA, UMS, Djoma Groupe et une énormité d’autres entreprises sont aussi le réceptacle des Malinké et gare aux Diallo et autres  »sots ».

En vérité, ce que je dépeins n’est absolument pas exhaustif, certes il existe bien entendu quelques mélanges hétérogènes, mais l’atmosphère qui y règne est tellement asphyxiante pour un Barry entouré de Cissé que la démission serait une bouffée d’air si la peur du chômage n’était dissuasive en ces temps qui courent.

In fine, il faut donc voir que L’Ethnocentrisme est une attitude spontanée donc universelle. Elle n’est point le propre exclusif de la Guinée ni plus ni moins son dada au grand dam des autres contrées de l’univers.

Il revient cependant aux peuples de le canaliser en le gargarisant de ses effets pervers.

Le barbare est d’abord l’homme qui croit à la barbarie nous disait l’éminent sociologue Lévi-Strauss. En cela, nous devons comprendre que la première réaction de la conscience humaine en dehors de toute réflexion est de considérer la culture d’autrui inférieur. L’enfer n’est-elle pas pour les autres?

Mais à l’intérieur d’une même nation dont on se constitue partie et tout, il serait aberrant de traiter ‘’d’autrui’’, celui avec qui nous partageons les mêmes valeurs. C’est cela le sentiment national et c’est au jugement d’un tel fonctionnement du cerveau que la diversité ethnique sera le fondement sur lequel repose notre force.

Par Abdel Kader Touré.



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