Vœux présidentiels des chefs d’État africains : messages, maquillage et retweets : Une chronique de Damien Glez

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Frais émoulus ou vieux routiers, les dirigeants africains se sont pliés à l’exercice de la présentation audiovisuelle de vœux à la Nation. Et au décryptage par les réseaux sociaux…

Sur le pont étroit qui relie, à la Saint-Sylvestre, une année à la suivante, l’attention réduite des réveillonneurs aux questions politiques est largement réservée à la proclamation des vœux présidentiels. Si les chaînes de télévision publiques sont de plus en plus négligées par les citoyens, le relais numérique des réseaux sociaux permet à ces monologues engoncés de conserver une audience déterminante. Le caractère ampoulé de l’exercice étant avéré et les annonces généreuses rarement au rendez-vous, les allocutions du « 31 » sont d’abord des happenings audiovisuels.

 « Qui a grossi ? » ou « qui s’est remis d’un pépin de santé ? » sont les premières questions que se posent les scrutateurs des soliloques de présidents. Une trop bonne mine paraîtra suspecte, aux yeux de complotistes qui présupposent que les hommes de pouvoir sont indûment fainéants et gourmands. À l’inverse, un air flapi pourra être interprété comme le signe d’une maladie dissimulée.

Et comme l’époque est à l’interprétation people de toute apparition, les discoureurs du jour font appel aux spécialistes du marketing audiovisuel. Le danger du direct est aujourd’hui écarté, en témoigne la lumière du jour visible sur certaines vidéos.

Exercice audiovisuel

Le décor d’Ibrahim Boubakar Keïta (IBK) est sobre à l’extrême – fond uni bleu marine  -, celui d’Ali Bongo est fait de boiserie et d’ouvrages, tandis que celui du bizuth Félix Tshisekedi est surchargé de verdure, tapis rouge, gazouillis et garde prétorienne en tenue d’apparat.

Si le drapeau national est un passage obligé, il est parfois associé à ceux d’organisations sous-régionales ou continentales. Le président ivoirien Alassane Ouattara s’exprime les coudes ancrés sur un bureau, comme pour dire « Je suis bien vrillé sur mon trône en cette année électorale », tandis que le Tchadien Idriss Déby Itno s’exprime debout, comme pour signaler qu’il reste « vert » en cette année de trentième anniversaire de son accession au pouvoir.

Une fois évaluée l’opportunité de lunettes et choisie la tenue d’apparat – costume-cravate « occidental » pour le plus grand nombre des francophones, d’Ali Bongo à Macky Sall en passant par Patrice Talon et le réfractaire Roch Marc Christian Kaboré -, il reste aux prestidigitateurs de l’audiovisuel à mettre en branle les ressorts du maquillage, de la lumière et des cadrages.

Si, en la circonstance, l’imagination est largement bridée au profit du solennel « face caméra », les Congolais démocratiques ont eu droit à toute la gamme des angles : leur président de dos au passage en revue des troupes ; en mode « les yeux dans les yeux », mais aussi dans des plans de coupe en contre-plongée avec le regard perdu vers un horizon imaginaire.

Source jeune Afrique



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