Une pléthore de questions se bouscule dans ma tête auxquelles s’ajoute un sentiment d’impuissance. Est-il possible que cette petite fille de 2 ans et demi ait si bien assimilé son rôle dans ce sombre dispositif ? Est-elle l’atout « sensibilité » pour sa maman ? Comment résister à ce visage si innocent ? Comment ne pas lui donner une pièce ? À quel avenir peuvent prétendre tous ces enfants maltraités, privés de leur enfance et de leur dignité ? Qu’est-ce qui peut bien justifier que des parents, des adultes responsables de mineurs puissent instrumentaliser la mendicité des enfants ? Qui sont les coupables : les parents, les chefs de quartier, les autorités gouvernementales, ceux qui continuent à leur donner l’aumône ? Quelles sont les pistes de solution pour éradiquer durablement ce fléau et redonner à ces enfants leur dignité en respectant leurs droits primaires ? Pourquoi dans un pays comme la Guinée, où la population a soi-disant le culte de la solidarité, nous n’excellons pas dans la promotion de la justice sociale ? Comment réussir à créer des dynamiques d’inclusion qui vont au-delà de la sphère familiale, mais servant toute la communauté ?
Une justice sociale nécessaire pour poser des bases saines pour l’Afrique de demain
Parce que la misère entrave la dignité de l’homme partout où elle sévit, ces couches de la population, dans leur profonde vulnérabilité, voient leur dignité s’effriter chaque jour davantage face aux poids de leurs urgences de survie ! Il est crucial d’œuvrer concrètement pour la justice sociale. Elle reste un des vecteurs de développement durable, car réduisant les inégalités, mais aussi l’impécuniosité caractérisée, et favorisant le bien-être des populations.
La place de ces enfants n’est pas dans la rue, mais dans des endroits sécurisants et structurants pour leur donner une opportunité de forger leurs destins. Ils ont besoin et ont le droit de prendre le meilleur départ possible dans la vie.
Cela passe par la satisfaction de leurs besoins primaires, par l’éducation, la sécurité, la paix et le droit à l’enfance… Comme nous le savons, lorsque l’enfant ne prend pas le meilleur départ possible dans la vie, cela entraîne un coût élevé pour lui et pour la société. Nul ne doute que nous aurons tous à payer cette addition et elle est partie pour être très salée.
Ces enfants, qui représentent l’avenir, subissent ces violations de leurs droits dans l’indifférence de la communauté, et ont de fortes chances de grandir sans qualifications, sans repères et d’atterrir à la périphérie de la société.
Aussi passons-nous à côté de futurs atouts pour nos pays, des génies, des créateurs, des scientifiques…Il est urgent d’adapter notre législation pour intégrer ce phénomène dans sa globalité.
Jusqu’à quand allons-nous continuer à signer des conventions, ratifier des traités internationaux sur les droits et la protection des enfants pour satisfaire aux ODD ou pour être éligible par rapport aux différents critères de financements des institutions internationales et autres bailleurs de fonds ? tout en sachant pertinemment que leur applicabilité sera problématique ; la source du problème n’étant pas solutionnée ! Sans considération de l’ensemble de la chaîne de valeur pour mettre en œuvre les conditions économiques, sociales et culturelles idoines, nous aurons des solutions en silo.
Les enfants sont l’avenir, et pour avoir un bel avenir ils ont besoin d’être accompagnés. Nous avons le devoir et l’obligation de ne plus laisser une partie d’entre eux être privés de ses droits fondamentaux.
Au-delà du droit, des solutions existent. Mettons-les en œuvre !
Pour éradiquer ce fléau de la mendicité infantile, les solutions seront endogènes et nécessiteront une mise en commun d’initiatives faisant intervenir toutes les parties prenantes : État, autorités religieuses, familles, société civile, ONG… Certaines comme celles citées ci-dessous peuvent adresser le problème dans sa globalité.
– La redynamisation des territoires ruraux pour éviter l’exode rural de familles entières qui se retrouvent en ville sans avoir les moyens d’y vivre de façon décente et qui peuvent venir augmenter les rangs des candidats à la mendicité.
. Il y a aussi tous ces jeunes garçons, venant de ces zones rurales qui subissent de plein fouet les profondes mutations du monde rural avec l’abandon de l’agriculture vivrière et de l’élevage. Ces garçons se retrouvent envoyés dans les zones urbaines
– Certaines croyances culturelles et religieuses gagneraient à être questionnées. Informer, sensibiliser mais surtout conscientiser les familles sur l’urgence de la situation de leurs enfants et à quel point elle peut représenter un sérieux handicap dans leur vie future.
– Une politique sociale inclusive pour améliorer le niveau de vie des couches les plus vulnérables et en finir avec les urgences de survie quotidiennes.
– Santé de la reproduction à promouvoir et à faire adopter davantage par les familles démunies qui continuent à enregistrer un fort taux de natalité sans pour autant avoir les moyens de subvenir aux besoins de leurs enfants.
Stop à la mendicité ! Stop à la maltraitance ! Stop à toutes les formes d’injustice qui inhibent la croissance harmonieuse des enfants.
Nos enfants ont droit à l’amour, à l’éducation, à la santé, à une vie décente et aussi à l’enfance. Une société qui ne protège pas ses enfants, une société qui n’éduque pas ses enfants ne se ferme-t-elle pas les voies de l’émergence ?
kerfella Cissé citoyen guinéen