Femmes – Viols en Afrique : « l’Afrique possède le taux de viol par habitant le plus élevé du monde »

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On viole beaucoup plus en Afrique qu’ailleurs dans le monde. C’est le principal enseignement de l’enquête des Nations unies « The World’s women 2015 : trends and statistics » publiée en avril 2016. Selon ce rapport, aucun continent n’échappe totalement aux violences faites aux femmes, mais l’Afrique possède le taux de viol par habitant le plus élevé du monde. Plus de 37% des femmes, soit plus d’une Africaine sur trois, auraient subi des agressions sexuelles au cours de leur vie.

L’instabilité, un facteur important

Selon les résultats de l’étude de l’ONU, ce sont les régions instables qui abritent les plus forts taux de viol par habitant. Le rapport précise néanmoins que « toutes les données ne sont pas disponibles dans les zones de conflit ». Mais les conflits armés du continent, où le viol rime avec actes de guerre, ne justifient pas ces agressions. Les abus sont aussi commis dans les pays dits en paix. En Afrique du Sud, par exemple, les crimes sexuels sont endémiques. « Le nombre de viols et autres agressions sexuelles a augmenté malheureusement rapidement, notamment depuis le début des années 1990 », explique Claire San Filippo, responsable du bureau des droits des Femmes à la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH).

Là aussi, l’abus sexuel comme arme de poing en Afrique n’est pas seulement le fait de soldats sans vertu. Le viol est parfois commis dans la sphère familiale ou l’entourage proche. « Les violences sexuelles perpétrées par son partenaire sont beaucoup plus répandues que le viol commis par une personne tierce », peut-on lire dans le rapport des Nations unies.

L’impunité reste la norme

Pourquoi l’Afrique détient-elle ce triste record d’abus sexuels au monde ? « L’impunité est le mot-clé, explique Claire San Filippo. Les auteurs de crimes ne sont quasiment jamais poursuivis. Sans justice, les violences sexuelles ont tendance à se généraliser, non seulement dans la période de conflit, mais aussi au-delà. » En République démocratique du Congo, par exemple, où le nombre de victimes reconnues s’élève à 500 000 depuis 1996, quelques avancées législatives et procès emblématiques ont été menés. Lundi 4 avril s’ouvrait, à la prison militaire de Kinshasa, le procès pour viol d’une vingtaine d’anciens Casques bleus du contingent congolais de la Mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca). Mais ce n’est pas encore suffisant : les violences sexuelles continuent d’être utilisées comme une arme de guerre, notamment à l’est du pays. Selon la responsable à la FIDH, les Etats doivent prendre « des mesures concrètes » pour renforcer le système judiciaire et « s’assurer de la conformité du cadre juridique avec le droit international ».

Le viol est l’un des crimes les moins rapportés à la police

Seconde cause : les discriminations envers les femmes. « L’institutionnalisation de ces discriminations sexistes favorise la violence à l’égard des femmes, notamment les violences sexuelles. » Combattre le viol passerait donc par la lutte contre les stéréotypes. « Faute d’équité, les victimes ont peur de se voir stigmatiser, elles ne vont pas porter plainte », déplore l’experte de la FIDH. Selon la coalition d’organisations non gouvernementales sud-africaines Shukumisa, « le viol est l’un des crimes les moins rapportés » à la police.

Mais les langues des victimes traumatisées commencent à se délier. Les filles bafouées semblent vouloir en finir avec l’omerta comme à Djibouti. Dix membres du Comité des femmes djiboutiennes contre les viols et l’impunité ont entamé une grève de la faim à Paris. Celles-ci dénoncent les soldats du gouvernement qui utiliseraient l’abus sexuel comme moyen de répression contre l’opposition depuis le début de la guerre civile en 1991.

Autre combat : celui de Zouhoura. Début février, la vidéo de l’adolescente victime d’un viol collectif a largement été diffusée sur les réseaux sociaux. Une vague d’indignation s’en est suivie et une enquête a conduit à l’interpellation de cinq fils de dignitaires. Depuis la France, la Tchadienne tente aujourd’hui de libérer la parole de ses amies violées « qui sont restées dans l’anonymat et n’ont rien dit ». Pour les Tchadiennes, mais aussi pour les habitantes des autres pays d’Afrique.

A noter « qu’il y aurait 1152 viols par jour en RDC: stigmatisation et marginalisation des femmes »

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