L’UFDG AUX PRÉSIDENTIELLES DE 2020 : MEILLEURE DÉCISION ? (Par Aboubacar Kaba FNDC CANADA)

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Étant membre de la coordination du FNDC Canada, je fus parmi les personnes choquées par la décision de l’UFDG de prendre part aux élections présidentielles du 18 Octobre 2020. D’autant plus que j’étais de ceux qui, au sein de notre antenne locale, prônaient vigoureusement le boycott pur et simple de toute élection à laquelle prendrait part l’actuel chef de l’Etat, Mr. Alpha Condé. Notre raison était toute simple : un putschiste n’organise les élections que pour légitimer sa forfaiture. Pour nous, après avoir usé de tous les moyens légaux pour s’opposer au changement de la constitution de 2010, après avoir refusé de participer aux législatives, et surtout après que des centaines de vies de nos compatriotes aient été fauchées dans le champ d’honneur, il serait indécent, immoral voire suicidaire de participer à ces élections présidentielles, avec Mr. Alpha Condé comme candidat. Car, la messe serait déjà dite avant dimanche, estimait-on.

Mais, en y réfléchissant de plus près, je suis venu à la conclusion que la décision de l’UFDG de présenter un candidat à ces élections est de loin la meilleure décision politique que ce parti n’ait jamais prise à date.  

En effet, la question fondamentale à poser est ceci : les élections présidentielles de 2020 sont-elles une des conséquences du changement illégal de la constitution de 2010 ? Ou est-ce qu’elles étaient déjà prévues par celle-là ? La réponse est tout simplement non.

En effet, il était clairement défini par la constitution de 2010 que le mandat de Mr. Alpha Condé prenait fin en 2020. Et  par conséquent, des élections présidentielles devaient avoir lieu pour le remplacer. Donc, c’est la constitution de 2010 qui régit ces élections présidentielles.

Par contre, il était tout à fait cohérent de refuser de cautionner le « referendum » du 22 mars 2020, en participant aux législatives, car ce tour de passe-passe n’était pas autorisé par la constitution de 2010.

Ce qui explique, au fond, la cohérence de la démarche de l’UFDG et de tous les partis politiques de l’opposition qui ont déposé leurs candidatures.

En réalité, la question cruciale à poser est : la candidature de Mr. Alpha Condé est-elle légale, légitime et morale ? Poser la question, c’est y répondre.

On peut voire donc une certaine cohérence dans la décision de l’UFDG à prendre part à ces élections. Maintenant, en quoi est-ce qu’elle est la meilleure décision à date de ce parti ?

Il y a, en fait, deux boulevards ouverts vers la présidence, dans le contexte actuel, par ces élections.

D’un côté, le camp présidentiel, après sa forfaiture, pensait rouler à tombeaux ouverts vers la présidence à vie, en se faisant accompagner par de partis politiques alimentaires pour légitimer son coup d’Etat. Il pensait servir le plat habituel des dictateurs africains à l’opposition : l’emmener à boycotter les élections pour lui enlever tout droit de contestation future. Mr. Alpha Condé en sait quelque chose, pour avoir suffisamment mangé ce plat avec le défunt président Mr. Lansana Conté. C’est d’ailleurs ce que ses conseillers actuels, tous habitués et maîtres de ces coups fourrés, lui ont conseillé. En fait foi la nouvelle assemblée nationale que l’opposition a de la difficulté à contester.

De l’autre côté, compte tenu du rejet total de l’idée d’un troisième mandat par l’écrasante majorité de Guinéens, le boulevard est grand ouvert pour tout parti politique majeur qui se serait engagé dans la compétition, en autant qu’il sache surfer sur la vague. Comme l’a si bien prophétisé le grand Sidya : « n’importe qui peut battre Koro ».

 C’est ce que l’UFDG a compris. C’est en cela sa décision est historique. Hautement stratégique, et donc de loin la meilleure qu’il n’ait jamais prise.

Dès l’instant où un parti majeur s’est lancé dans la compétition, et non des moindres, la peur a changé de camp. Elle s’est emparée des fossoyeurs de la démocratie. Les cartes sont rabattues. Leur plan est tombé à l’eau.

Maintenant que la candidature de l’UFDG est actée et acceptée, quoi faire ? Car, quand le vin est tiré, il faut le boire, dit-on. C’est l’objet principal de ma réflexion.

En réalité, ces élections vont être le vrai referendum auquel le peuple de Guinée n’ait jamais été convié depuis son indépendance historique. Il s’agit, ni plus ni moins, de se prononcer POUR ou CONTRE un troisième mandat en Guinée.

Il s’agit, en effet, de dire si OUI ou NON on accepte un coup d’Etat, civil ou militaire, en Guinée. De répondre OUI ou NON si on accepte qu’une minorité d’individus mettent en péril la stabilité et la paix de toute une nation pour leurs intérêts égoïstes. De choisir OUI ou NON si on continue à se faire tuer, sans aucune forme de procès, dans son propre pays par ceux qui sont chargés de nous protéger. Tout simplement, il s’agit du referendum de la liberté, de la dignité, de la justice, de l’espoir : voulons-nous vivre, OUI ou NON, dans la dictature ?

Étant entendu que nous sommes engagés dans un referendum, maintenant, comment faire pour faire en sorte que l’UFDG surfe sur la vague pour assainer une défaite cinglante aux ennemis de la République ?

Cela nécessitera l’union sacrée de tous les fils et filles de la Guinée pour sauver notre jeune démocratie. En ce sens, l’UFDG pourrait adopter l’appellation de « Union Sacrée des Forces Démocratiques de Guinée », USFDG.

Pour ce faire, je conseille incessamment au président de l’UFDG de prendre l’engagement ferme et solennel d’abolir le « torchon » de papier qu’on appelle constitution d’Avril 2020. Car, il ne s’agit ni plus ni moins que d’un torchon qui, de surcroit, est « bâtard » : Qui connait les rédacteurs de cette humiliation de constitution ? Qui connait ses falsificateurs en Avril 2020 ? Et plus préoccupant encore, qui connait le peuple qui l’a adoptée ?

Donc, avec cet engagement, Mr. Cellou Dalein devrait immédiatement tendre la main au FNDC, aux partis politiques de l’opposition, prenant part ou non aux élections, aux intellectuels guinéens à l’intérieur et à l’extérieur, aux organisations civiles, pour former cette grande coalition « USFDG ». On ne doit lésiner sur aucun moyen : politique, financier, diplomatique, incitatif, etc, pour y arriver. L’UFDG devrait mettre de côté toute velléité d’autosuffisance, pour arborer la tenue de rassembleur. Car, comme expliqué plus haut, ce n’est pas Cellou contre Alpha. Mais c’est la démocratie contre la dictature, la liberté contre l’oppression, le rassemblement des guinéens contre leur division.

En tant que tel, chaque parti politique compte. Chaque organisation sociale compte. Chaque citoyen(ne) compte. En somme, chaque voix compte : «Creusez, fouiller, bêchez ; ne laissez nulle place Où la main ne passe et repasse. », recommandait le laboureur à ses enfants dans Jean de La Fontaine.

L’objectif ultime de la coalition sera de redresser la Guinée, dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale de large consensus.

Quant au programme de société à présenter aux Guinéens, je n’en vois qu’un seul et unique : barrer la route à un troisième mandat. C’est le seul qui vaille dans le contexte actuel de  notre pays. Car aujourd’hui, les guinéens n’ont pas besoin de l’eau ni de l’électricité. Ce dont les guinéens ont besoin aujourd’hui, c’est la stabilité politique. Ce à quoi aspire le peuple de Guinée aujourd’hui, c’est la justice et la réconciliation nationale. Ce que la jeunesse guinéenne réclame aujourd’hui, c’est l’espoir de vivre en paix et pouvoir se débrouiller dans son propre pays. Tout simplement, on a besoin aujourd’hui de refonder la Guinée pour repartir sur des bases saines.

Dans cette perspective, je propose à l’UFDG le slogan de campagne suivant : « AKHADAN !».

En effet, il faut que l’injustice et l’impunité foutent le camp définitivement de ce pays. Il faut que l’ethnocentrisme et la division cessent pour de bon. Il faut que la gabegie financière et le détournement des deniers publics disparaissent. Il faut que la caporalisation des institutions de la République soit chose du passé dans ce pays. Surtout il faut que l’impunité et le non respect de nos lois prennent le bord pour de bon. Tout simplement il faut que « akhadan, akhadan, akhadan, na kha khimbeli », pour que vive la Guinée !

Évidemment, tout ce qui précède serait vain si des mesures concrètes ne sont pas mises en place sur le terrain pour garantir la transparence des élections. Comment s’assurer que les voix de la liberté ne soient pas détournées par les tenants de l’axe du mal ?

Entre autres, il faudrait mettre à contribution, au maximum, les nouvelles technologies de l’information et de communication pour sécuriser chaque voix dans chaque bureau de vote. Il s’agira d’utiliser les Twitter, Facebook  et Whatsup de ce monde, mais aussi les SMS et les MMS pour collecter et remonter, en temps réel, les votes au fur et à mesure qu’ils rentrent. Cela prendra une plateforme Internet centralisée, officielle et hautement sécurisée, où les résultats, mais aussi tous les incidents, seront publiés, bureau de vote par bureau de vote.  

L’UFDG devra faire appel, pour ce faire, à toutes les compétences nationales et internationales dans le domaine des TIC pour concevoir et mettre en place, très rapidement, cet outil essentiel. Ensuite, le faire connaitre et certifier auprès des organisations internationales en charge de superviser les opérations.

Pour terminer, je lance un appel fraternel, patriotique et démocratique, au nom de l’intérêt supérieur de la Nation, à Mr. Sidya Touré, Mr. Lansana Kouyaté, Mr. Mamadou Sylla, Mr. Bah Oury, tous les partis politiques de l’opposition, engagés ou non dans le processus, les forces vives de la Nation, particulièrement le FNDC, les intellectuels, à l’intérieur ou à l’extérieur de la Guinée (en particulier Mr. Thierno Monénembo qui avait menacé de prendre ses distances de toute formation politique qui prendrait part à ces élections avec Mr. Alpha Condé comme candidat), les religieux, les journalistes, les citoyens guinéens de l’intérieur ou de l’extérieur, épris de paix et de justice et soucieux du devenir de la Guinée, à venir massivement rallier l’axe du bien pour barrer la route à la velléité de présidence à vie. De telle sorte qu’au soir du 18 octobre 2020, à la sortie des urnes, le peuple de Guinée, comme un seul Homme, dans un élan de révolution populaire, proclame haut et fort : NON au troisième mandat en Guinée, pour qui que ce soit !

Vive la Guinée !

Aboubacar KABA, Membre de la coordination FNDC Canada



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