Un ministre peut-il avoir les mains libres chez nous ? Si oui, jusqu’où ? S’interroge Maître Traoré

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Un ministre est chargé de la mise en œuvre de la politique de la Nation dans un secteur donné. Cette politique est définie par le Président de la République dans notre pays. La politique de la Nation se décline en politiques sectorielles confiées à des départements ayant chacun à leur tête un ministre. À la limite, ce n’est même pas le ministre qui est chargé de la définition de la politique sectorielle du département dont il a la charge. Il en assure tout simplement la mise en œuvre. Cela se comprend puisque ce n’est pas lui qui a été élu mais plutôt le Président de la République. C’est ce dernier qui a bénéficié de la confiance des électeurs sur la base d’un programme et d’un projet de société qu’il leur a proposés.

Dans la nomination d’un ministre, trois situations peuvent se présenter:

1- Celui qui est nommé a fait des démarches ou fait intervenir des soutiens et appuis pour obtenir un portefeuille ministériel quel qu’il soit, l’essentiel étant qu’il soit ministre.

2- Le Président de la République nomme un homme ou une femme à un poste de ministre, sans l’avoir consulté au préalable et sans que ce dernier n’ait fait aucune démarche pour obtenir sa nomination. Il se base uniquement sur la compétence réelle ou supposée de l’intéressé et la connaissance de celui-ci du secteur concerné.

3- La personne nommée a été préalablement consultée par le Président de la République. Cette personne accepte sa nomination avec ou sans condition. Mais il faut bien savoir quelles conditions l’intéressé peut poser avant d’accepter sa nomination. Dans tous les cas, elles n’iront pas jusqu’à remettre en cause de façon substantielle la politique définie par le Président de la République. Il peut exiger par exemple d’avoir une large voire une très large marge de manœuvre dans la gestion de son département et notamment dans le choix de ses collaborateurs, l’assurance de ne pas être confronté à des inférences dans la prise de ses décisions etc. Mais il ne peut en aucun cas substituer sa propre « politique » à celle définie par le Président de la République. S’il pose des conditions- chose rarissime chez nous- il peut penser à jeter l’éponge en cas de non-respect de celles-ci.

Dans les deux premiers cas, il est difficile qu’un tel ministre ait les mains libres. Il ne pourrait même pas être dans la position d’un ministre qui pourrait exiger d’avoir les mains libres vu les circonstances de sa nomination.

Et même dans le troisième cas, le ministre finit par s’accommoder du non-respect des conditions qu’il avait posées et accepter d’avaler des couleuvres, surtout avec la pression de la famille, de la tribu, des amis et proches.

En fin de compte, l’on va se retrouver avec quelqu’un qui n’a pas forcément les coudées franches mais qui se plient à la volonté du Président de la République.



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