Lettre ouverte   au président de la république professeur Alpha Condé: Sonny CAMARA

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Excellence Monsieur le Président, Je vous adresse aujourd’hui cette lettre ouverte car, je pense qu’il est nécessaire de  vous dire à quel point les guinéens pleurent.

Excellence Monsieur le président, Je vous adresse cette lettre car, je pense qu’il est primordial de vous dire combien de fois le peuple est meurtri

Excellence Monsieur le président, Je vous adresse aujourd’hui cette lettre car, je pense qu’il est vital de vous dire combien de fois l’Etat se délite en Guinée.

Monsieur le président  au lendemain de votre élection à la magistrature suprême, vous avez promis aux Guinéens le changement en vue d’avoir une Guinée émergente, avec le slogan « la Guinée is back » hélas, après 8 ans de gestion, le pays va mal. Le premier échec de  votre régime est le fait que les fondements ou les préalables du changement ont été escamotés.

Le virage devrait être amorcé en tenant compte de certaines contraintes, qui touchent tous les aspects de la vie. Ceci devrait commencer par une expertise à travers l’identification des hommes qui sont à même de mieux gérer la chose publique. Mais aussi la connaissance profonde de notre société et de notre histoire, autrement dit la sociologie de la Guinée. Sur ce, il était question de mettre en exergue, les atouts, les faiblesses, les contraintes, mais aussi les menaces qui pèsent sur le pays. Cette expertise, allait vous permettre  de bâtir une nation forte, hélas,  Vous êtes passés complément à côté de ces préalables pourtant, indispensables pour tout développement. Ainsi, l’espoir s’est transformé en désespoir, et les maux : la corruption, le népotisme, l’amateurisme ou encore le détournement du denier public sont devenus monnaies courantes au plus haut sommet de l’état. Il faut donc une refondation de notre capital humain, de nos lois, mais surtout du contrat social pour sortir de cette situation.

Nos lois et le contrat social doivent être adoptés aux réalités du pays. Le changement du code électoral voté par vos députés et ceux de l’UFDG à l’assemblée, et les conséquences qui ont survenues lors de l’installation des administrateurs locaux, est un exemple illustratif, qui montre que tout projet de lois, doit tenir compte  des réalités à la fois nationales mais aussi locales.

Monsieur le président vous devez savoir que vous dirigez pour le peuple, non pour une oligarchie qui prend le pays en otage depuis trop longtemps. En ayant cela en tête, il serait très facile pour vous d’agir.

La fracture sociale est grande, mais en même temps vous avez les clés de l’enfer et du paradis pour les guinéens. A vous de savoir lesquelles vous en servir pour sauver la Nation.

Monsieur le président, aucun guinéen ne doit mourir sans justice

Monsieur le président, aucune vie ne doit être anéantie sans justice

Monsieur le président, aucune famille ne doit être endeuillée sans aucune justice.

Depuis votre accession au pouvoir, beaucoup de guinéens ont trouvé la mort dans des manifestations : plus de 100 morts sur l’axe, des dizaines de morts en Forêt, en haute Guinée, en Moyenne Guinée, sans que l’état n’ouvre une enquête afin de situer les responsabilités et de traduire les présumés coupables en justice. Des crises sociales, économiques, électorales sont devenues monnaies courantes de votre gouvernance. Comme un mépris, à chaque fois qu’un guinéen est tombé, vous avez brillé par votre absence. Pourtant, le minimum était de faire une déclaration, une condamnation et une ouverture d’enquête.

Permettez-moi de vous rappeler Monsieur le président de ces phrases qui raisonnent encore dans la tête des milliers de guinéens.

L’on se rappelle du début de votre mandat, lors d’un de vos discours, vous avez dit : « j’ai hérité d’un pays et non d’un Etat ». Alors Monsieur le Président regardez-vous dans le miroir, et dites-nous l’état dans lequel se trouve aujourd’hui le pays.

L’on se rappelle encore de cette autre phrase « si mon frère Malick vivait encore, beaucoup de cadres ne seraient pas là ».  Alors Monsieur le Président regardez-vous dans  un miroir et dites-nous qu’après 8 ans de règne, ne connaissez-vous pas encore les guinéens ?

L’on se rappelle lors d’un de vos discours de cette célèbre phrase : « En Guinée, plus  le mensonge est gros, plus le guinéen y croit ». Alors Monsieur le président regardez-vous dans le miroir et dites-nous que vous n’avez jamais menti au peuple.

Par ailleurs, Depuis plus de deux mois, les classes sont fermées, un autre problème qui  vient aggraver l’état d’un système éducatif déjà en lambeaux. Pourtant, l’éducation est le poumon de toute société, car, elle  donne une orientation pour le futur en fonction des besoins sociétaux. Dans cette éducation, l’école doit être l’élément principal pour mieux former les générations futures, donc, une sorte de moule dans lequel l’état met ses enfants afin de leur donner une certaine forme ou formation et d’en faire de braves citoyens. Autrement dit, elle est le reflet de la société et de son évolution. Selon Jules Ferry « c’est de l’instruction que naît la grandeur des nations ». Il faut rappeler que le rôle que doit jouer l’école dans la socialisation d’un individu est parmi les taches les plus importantes dans toute société. Ainsi, peut-on dire que cette importance n’est plus à démontrer puisqu’elle est un fait irréfragable. Pour toute société qui veut s’engager dans le processus d’un développement intégral, l’éducation demeure la méthode fondamentale du progrès de la réforme sociale et économique.  Mais en Guinée, depuis un moment, cette mission régalienne de l’Etat est malmenée, piétinée et sabotée par votre gouvernance.

Ces phrases et ces descriptions résument le malaise que vous avez infligé au peuple pendant 8 ans et surtout de l’affaissement de l’Etat. Pourtant, les attributs du contrat à durée déterminée qu’on vous a confié sont clairs et bien définis dans notre constitution (titre III : article 27-51). Il suffit juste de les appliquer pour « rendre sa grandeur à la Guinée ». Notre devise est : Travail, Justice et Solidarité. Mais aujourd’hui, aucune de ces valeurs n’est respectée par votre gouvernement.

Le peuple ne vous demande pas de faire des miracles, le peuple ne vous demande pas d’envoyer des satellites sur la planète Mars, le peuple ne vous demande pas de faire des expéditions sur la lune. Le peuple vous demande seulement des fondamentaux, de la justice sociale, du renforcement du tissus social, d’une éducation de qualité, des soins de qualité, bref des besoins primaires.

Vous pouvez construire des barrages, vous pouvez construire des hôtels, vous pouvez construire des routes, mais si vous n’instaurez pas la justice sociale, si vous ne luttez pas contre la montée de l’ethnocentrisme, si vous ne rendez pas les institutions fortes, si vous ne luttez pas contre certains maux qui gangrènent notre Etat, la Guinée foncerait droit au mur. Et vous laisserez derrière vous une grande plaie, qui serait difficile à soigner et à cicatriser. Un père de famille doit laisser les fondamentaux à ses enfants leur permettant de  grandir et d’affronter la vie.

L’on se rappelle de ce poème de Jean de la Fontaine le Laboureur et ses enfants, le père s’adressa à ses enfants en ces termes : « Travaillez, prenez de la peine : C’est le fonds qui manque le moins. Un riche Laboureur, sentant sa mort prochaine, Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins. Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l’héritage Que nous ont laissé nos parents. Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l’endroit ; mais un peu de courage vous le fera trouver, vous en viendrez à bout. Remuez votre champ dès qu’on aura fait l’Oût. Creusez, fouiller, bêchez ; ne laissez nulle place Où la main ne passe et repasse. Le père mort, les fils vous retournent le champ Deçà, delà, partout ; si bien qu’au bout de l’an Il en rapporta davantage. D’argent, point de caché. Mais le père fut sage De leur montrer avant sa mort Que le travail est un trésor ».

Monsieur le président inspirez-vous de ce poème, et dotez le pays des structures de bases et surtout instaurez la justice dans toutes ses dimensions. Car, le meilleur châtiment, la meilleure justice est l’histoire. L’histoire vous jugera en fonction de ces valeurs.

Vous avez passé toute votre vie à lutter contre les régimes précédents, mais une fois au pouvoir, l’on se pose énormément de question sur votre capacité à diriger la nation tellement que l’autorité est mise en mal pendant votre gouvernance.

Monsieur le président Marx disait : «  c’est la position sociale qui détermine la conscience de l’individu ». Alors Monsieur le président vous devez agir en tant que Président et non opposant.

Pour terminer Monsieur le Président, je vous cite ces quelques passages de Machiavel dans son ouvrage le Prince. Dans sa conception de l’Etat, « Machiavel accorde à celui-ci un rôle de régulation des égoïsmes particuliers. L’Etat n’est donc pas la simple expression de la force brutale exercée contre le peuple. Bien au contraire, celui-ci (le peuple)  est le fondement de la puissance du prince et son appui pour agir ». Autrement dit, un président, doit tout à son peuple, c’est pourquoi, il doit agir  en fonction des besoins de celui-ci.

Je rajoute aussi que vous devez sortir par la grande porte en dépit de votre bilan très mitigé.

Ne changer pas la constitution si vous aimez la Guinée.

En espérant que cette lettre ouverte retiendra favorablement votre attention, je vous prie Monsieur le président d’agréer l’expression de ma plus haute considération.

Sonny CAMARA Citoyen Guinéen



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