« Personnalité guinéenne du mois », Djenabou Diallo « Djen Boiro », juriste fiscaliste et militante pour les droits des femmes et des enfants

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Après trois mois de pause, notre rubrique  » personnalité guinéenne du mois » revient avec un nouveau numéro. Cette fois-ci, le choix a été porté sur une femme, une juriste, une mère de famille et surtout une militante engagée pour la cause de la femme et de l’enfant.
Le but de cette rubrique est de mettre en valeur le travail des guinéens qui sont dans l’ombre mais qui font bouger les choses dans leur domaine. C’est dans ce sens que la rédaction du site www.guineenondi.com a choisi cette brave dame à cause de son engagement pour les droits des femmes et des enfants. Djenabou Diallo  » Djen Boiro » est notre personnalité guinéenne du mois.
Lors d’un de ses discours, Michelle Obama disait: « La réussite, ce n’est pas combien d’argent vous gagnez. C’est l’impact que vous avez sur la vie des gens. ».Cette phrase traduit réellement ce que Djenabou Diallo réalise depuis plusieurs années sur le terrain, en ce sens que ses différentes actions impactent positivement la vie de milliers de femmes et d’enfants. L’ONG qu’elle dirige est devenue aujourd’hui une sorte de sanctuaire pour les femmes et les enfants, Un arbre sous lequel ces femmes et ces enfants peuvent se mettre à l’ombre.
Qui est Djenabou Diallo ?
Née à Télémélé en Moyenne Guinée, Djen Boiro a fait ses études primaires et secondaires au Groupe scolaire Saint-georges couronnées où obtention le baccalauréat de l’enseignement en série sciences sociales. Après le bac, elle décida d’aller faire des études supérieures au Sénégal à l’université du Sahel où elle obtient avec brio une maitrise en droit Privé en 2011.
Amoureuse de son pays, elle décide de entrer au bled pour servir la nation. Dès lors, elle intègre le milieu de conseil juridique et fiscal où elle s’épanouit depuis près de 14 ans. Parallèlement à ses obligations contractuelles, elle commence à militer dès 2013 pour le respect des droits des femmes et des enfants. A partir de cette date, Djenabou Diallo répondait présente dans toutes les luttes pour la protection des droits humains en général et celle des femmes et des enfants en particulier. C’est eu égard à ce parcours exceptionnel et altruiste qu’elle a été choisie par notre rédaction comme « Personnalité guinéenne du mois« . Nous sommes allés à sa rencontre
Guinée Nondi: Bonjur Dhenabou Diallo
Bonjour Guinée Nondi, bonjour Sonny
Nous savons que vous êtes militante engagée pour la cause des femmes et des enfants, comment avez-vous eu l’idée de créer l’ONG l’ONG Mon Enfant Ma Vie (MEMAV) ?

Tout d’abord je vous remercie pour l’opportunité que vous m’offrez à travers votre media et merci pour cette question. En 2017, après avoir vécu personnellement un drame lors duquel j’ai été victime de négligences et de violences obstétricales, j’ai décidé de ne pas me taire et de dénoncer mes bourreaux. Cette dénonciation m’a valu des dizaines de témoignages me faisant comprendre que la violence contre les femmes s’étendait jusque sur la table d’accouchement, et que beaucoup de victimes dans notre pays pensaient être des cas isolés. C’est ainsi qu’en novembre 2019 avec d’autres femmes, nous avons créé l’ONG Mon Enfant Ma Vie (MEMAV).
A travers cette ONG nous luttons contre toute forme de violences faites aux femmes avec un accent particulier sur la promotion d’une prise en charge humanisée des femmes pendant la grossesse et l’accouchement, la lutte contre la malnutrition infantile, la mortalité et la morbidité infantile et le viol.


Mais à part ce militantisme, vous travaillez dans quoi, quel est votre principal secteur d’activité ?


Je travaille dans le conseil juridique et fiscal depuis 14 ans. Avec l’ONG je ne suis guidée que par mon amour de l’humain et cette volonté d’aider les autres. Donc au même titre que les autres membres, nous donnons bénévolement et gratuitement notre temps et notre savoir à l’ONG. Notre seule rétribution reste le sourire qu’on donne aux autres à travers nos actions.


Il y’a quelque jours, vous avez fait une publication sur votre page Facebook selon laquelle vous avez été choisie parmi les 50 femmes africaines en développement par la Fondation Donors for Africa Donors For Africa (prix AWID) basée au Nigeria, de quoi s’agit-il ?


Oui effectivement !
Le prix AWID se positionne comme un phare de reconnaissance, mettant en lumière les héroïnes souvent méconnues – des femmes africaines qui sont à l’avant-garde des initiatives de développement mondial. Cette distinction organisée par la Fondation Donors for Africa, ne se limite pas à la simple reconnaissance ; elle vise à amplifier les histoires et les réalisations des femmes qui sont des catalyseurs de changement dans leurs communautés et au-delà.
Il s’agit également de découvrir des femmes inconnues qui transforment leurs communautés. Chaque année, la fondation recherche des femmes africaines exceptionnelles, militantes, agents de changement, représentantes gouvernementales, membres d’équipes et entrepreneuses sociales qui créent des impacts tangibles et font avancer les objectifs de développement durable (ODD).
Qu’il s’agisse de diriger des mouvements de base, de mener des projets innovants, de servir en tant que scientifiques ou chercheuses, ou d’influencer les politiques à tous les niveaux. C’est ainsi que sur 1700 candidatures provenant de 34 pays africains, j’ai été choisie pour l’année 2024 comme étant l’une des 50 femmes africaines en développement par cette fondation.


Que ressentez-vous après cette distinction, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?


Un sentiment de joie et de fierté tout simplement. A travers cette distinction j’ai ressenti que nos actions chez MEMAV sont reconnues et que nous impactons réellement nos communautés. Elle m’a également boostée et donné l’envie de continuer malgré les péripéties et manque de financements. La réaction également des gens lorsque j’ai publié la nouvelle était tout simplement impressionnante et encourageante. Les gens croient en nous et à MEMAV et pour rien au monde nous n’allons abandonner. C’est une mission qu’on s’est assignée nous allons donc la poursuivre.


En votre qualité de militante engagée pour la cause des femmes et des enfants, quels conseils avez-vous à donner aux femmes dans le cadre de la socialisation primaire des enfants ?


Les femmes sont le socle de nos sociétés malgré qu’avec leurs enfants elles représentent la couche la plus vulnérable de cette même société. Elles apportent une précieuse diversité de perspectives, expériences et compétences à tous les domaines de la famille de la culture ou de la société en général.
Pour changer les choses dans le futur, je pense que les femmes devraient revoir la façon d’éduquer leurs enfants. Il ne suffit pas de dire « respectez nos droits », elles doivent contribuer à éduquer de futurs hommes qui respectent les droits de tout être humain ; en particulier ceux des femmes. Que les garçons ne soient pas privilégiés face aux filles, qu’ils apprennent en famille déjà le partage des tâches ménagères, le respect de leur sœurs cousines, amies, tantes etc …et surtout qu’ils apprennent naturellement à s’insurger lorsqu’ils voient une situation d’injustice qu’elle soit subie par une personne de leur entourage ou pas.
Elles doivent également éduquer leurs filles pour en faire des femmes bien éduquées de telle sorte qu’elles puissent se protéger au maximum de toute violence qu’elle soit physique, morale ou économique.
Les filles doivent connaître leurs droits et comprendre que rien ne leur est impossible. En résumé, pour changer les choses, faisons de nos enfants, filles comme garçons des êtres épris de justice et d’équité dès l’enfance.
Si on vous nommait aujourd’hui ministre de la promotion féminine et de l’enfance, quelles seraient vos priorités ?
Ce Ministère dans notre pays a longtemps été considéré comme l’un des moins importants car pour beaucoup, la condition de la femme et de l’enfant ne mérite pas qu’on s’y attarde.
Il a donc besoin d’être rehaussé afin de lui redonner la place qu’il mérite. Redorer son image, communiquer à tous les niveaux sur son rôle en impliquant toutes les parties prenantes (employés du ministère, PTF, sociologues, religieux, société civile, groupement de femmes, etc.) pour permettre d’atteindre au maximum ses objectifs. Pour cela, il faut d’abord une vision et bien entendu un soutien politique au plus haut sommet de l’Etat aux projets et actions de ce ministère.
Il conviendra également de rétablir la confiance entre ce ministère et les PTF en exécutant correctement les projets financés et en justifiant l’utilisation des fonds qui ont été alloués.
L’autre volet auquel il conviendra également de se pencher, c’est comment faire passer le message sur l’importance de la lutte contre les VBG dans notre société. Dans une société patriarcale à majorité analphabète, je pense qu’une communication plus réceptive et adaptée à la cible sera de mise.
Il faudra également porter des projets de loi et des politiques visant à protéger les droits des enfants, des femmes et des personnes vulnérables. Promouvoir l’accès des femmes aux ressources économiques telles que la terre et le crédit, et soutenir le développement des petites entreprises dirigées par des femmes pour en faire des championnes et des modèles de réussite dans leur domaine.
En collaboration avec les différents ministères de l’enseignement, œuvrer dans des campagnes de sensibilisation et intégrer dans les cursus de formation des programmes visant à proscrire les attitudes et les comportements sociaux qui perpétuent les inégalités de genre et les violations des droits des femmes et enfants.
Un autre volet important, sera d’œuvrer à offrir aux enfants vivants avec des troubles neurologiques et des différences, une intégration dans le système d’enseignement afin qu’ils puissent bénéficier d’enseignement adéquat et adapté à leurs handicape. Un enfant peut être différent, mais il reste un enfant de la République et a droit à l’enseignement et à la dignité.
Qu’el est votre dernier mot?
Mon dernier mot serait un appel à l’action et à l’engagement en faveur des droits des femmes et des enfants. Je dirai que chaque personne peu importe son sexe ou son âge a le droit à la dignité, à l’égalité et à la protection. Nous devons continuer à nous battre pour mettre fin à toutes les formes de violences à l’égard des femmes et des enfants, et à travailler ensemble pour créer un monde où chacun peut vivre en sécurité et en toute liberté.
En tant qu’activiste, nous avons le devoir de rester mobilisés, de sensibiliser, de plaider et d’agir pour faire avancer cette cause vitale. Ensemble, nous pouvons créer un avenir meilleur pour les générations présentes et futures.
Je vous remercie
C’est moi qui vous remercie pour l’opportunité offerte par votre media, merci à toute la rédaction
Entretien réalisé par Sonny Camara



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