La refondation n’est pas un slogan. Première partie ( Par Kémoko Camara)

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Les sorties médiatiques des membres du CNRD exposent les réalités véritables de la situation dans laquelle se trouve notre pays. Leurs communications laissent entrevoir l’absence d’une vision et d’un projet concerté et cohérent du gouvernement. Il est clair que l’on nous parle de refondation sans vision, ni projet de refondation. Alors que la seule excuse de ce putsch est l’opportunité que ça nous aurait offert pour remettre notre pays sur la bonne voie. Il n’y a aucune raison valable à la rupture de l’ordre constitutionnel, au recul démocratique, à l’isolement diplomatique de notre pays, au gel des financements… si c’est pour se vautrer à maintenir la routine administrative. Pour tout citoyen conscient que nos immenses potentialités humaines et matérielles contrastent avec la situation sociale, économique et politique de notre pays, la tendance devrait être à l’introspection générale. Mais on a senti des cadres inexpérimentés, déconnectés des véritables enjeux, parfois immatures qui se cachent derrière le déni des réalités. Alors de quelle refondation s’agissait-il ? Quel est l’objectif du CNRD? Où allons-nous ? Sommes-nous prêts à perdre 5 ans dans cet état pendant que les autres avancent ?

Tous les experts en développement sont unanimes que le développement d’un pays comme le nôtre repose sur la paysannerie. Non seulement, la nature y est fortement favorable, mais surtout plus de la moitié de la population vit de ce secteur. Le secteur est estimé à plus de 60 % de la population guinéenne. C’est là où nous pouvons réaliser le plein emploi, c’est encore là où nous pouvons faire de la croissance réelle, c’est encore là où nous pourrons relancer l’économie réelle. Nous savons tous que l’économie réelle a disparu, ce qui nous impose une croissance appauvrissante, par le fait que la richesse dégagée provient de l’exploitation anarchique des mines. La richesse nationale contraste avec le PIB par habitant. Ce qu’il faut c’est un changement de cap et non un accompagnement par des mesurettes. Le développement de ce secteur aboutira :

l’auto-suffisance alimentaire : la Guinée, à l’instar des autres pays africains, a hérité du modèle colonial. Le Sénégal français par exemple, vendait son arachide en Europe et avec une partie de ces fonds, importait du riz d’ Asie pour alimenter la population locale de l’époque. La Guinée française, c’était la banane. A l’indépendance, les pays africains pour la plus part, ont maintenu ce modèle colonial. Ils l’ont appelé « la spécialisation ». Le Sénégal post-colonial obéît encore à ce triangle de dépendance. La République du Sénégal vend son arachide en Europe et importe du riz de l’Asie. La Guinée par une agriculture d’exploitation exporte de l’ananas, de la banane… et importe 70 % de sa consommation de denrées de première nécessité. Au lieu de financer le secteur le plus porteur, nos États subventionnent les importations de denrées de première nécessité. Alors que toutes les conditions sont réunies aujourd’hui pour investir dans la production nationale. Quel projet de refondation pour que la consommation locale soit produite en Guinée ?

la réduction drastique du taux de chômage. Ce secteur regorge plus de 60 % de la population. En l’organisant, et en y investissant, l’État assurerait l’emploi à plus de la moitié de la population. Donc réduire de façon importante le taux de chômage, ce n’est ni le tertiaire, ni l’exploitation anarchique des mines. Mais bien l’organisation et l’investissement dans le secteur primaire. Or depuis 1984, notre pays attend que les investisseurs viennent investir pour créer de l’emploi. Depuis 1984, l’élite dirigeante véhicule ce narratif mensonger selon lequel c’est les autres qui viendront créer de l’emploi chez nous. Étant donné que l’Afrique ne reçoit que 7 % des IDE investissements directs étrangers, la refondation devrait servir à rectifier dans la loi des finances, la part qui revient à ce secteur.

la relance de l’économie réelle
S’il faut saluer la maximisation de la richesse nationale sous la troisième République, il faut regretter cependant que la quasi totalité de cette richesse ait émané du secteur minier. L’apport du PIB par habitant est faible parce que l’économie réelle est inexistante. Ce qui fait que la richesse nationale contraste avec le revenu par tête d’habitant. Ce qui fait que la croissance est appauvrissante parce qu’elle émane de l’exportation des matières premières. La relance de la paysannerie aboutira à la création de la valeur, à l’économie réelle, à la croissance réelle, donc à la réduction de la pauvreté.

la réduction de l’exode rural et de l’émigration de masse
Le développement c’est à partir de la base, allant des villages vers les villes. Pas l’inverse. Le développement, c’est permettre aux citoyens de Sansalé, de Boola, de Kimbély ou de Seinkéfara… de trouver leur bonheur sur place. La relance de l’agriculture, de la pêche, de l’élevage permet de densifier nos campagnes et d’en faire d’intenses zones d’activités économiques. Et le développement de nos campagnes permettra de densifier nos centres ruraux et urbains. Ce qui freinera inéluctablement l’exode rural et l’émigration massive.

Pourtant le ministre de l’agriculture n’a exposé aucun projet de refondation de ce secteur. Il est apparu plusieurs fois dans les médias, mais nulle part il n’a évoqué une vision claire de refondation. On a toujours entendu un ministre ordinaire en train d’évoquer des mesurettes pouvant simplement maintenir le statu quo, alors que la tendance est à l’édification d’un logiciel nouveau, d’une politique managériale transformationnelle de ce secteur clé pour en faire le socle de notre modèle de développement. Ce ministre parviendra peut être à maximiser la production nationale, mais parviendra t-il à transformer ce secteur pour en faire le socle de notre économie ? Ou bien continuerons-nous à nous reposer sur les mines, un secteur dont nous n’avons pas la maîtrise ?

Plus d’une année après le putsch du 5 septembre, le CNRD n’a posé aucun acte allant dans le sens de la refondation. Aucun acte. Nous sommes dans le même système. Les mêmes pratiques de corruption, de délinquance financière. L’État de police sévit toujours. L’acharnement contre les principaux leaders politiques toujours d’actualité. L’instrumentalisation de la justice à travers la CRIEF qui n’a de griefs que contre les leaders politiques. Bref! Le CNRD n’a fait que récupérer le système. La CRIEF qui aurait pu être sa seule réussite est moins une cour de justice qu’un instrument d’élimination politique. Voici la seule juridiction au monde capable de faire la qualification juridique des faits qui n’existent pas. Dans l’ordre normal de la procédure, c’est les faits qui sont cités au prime abord. Ensuite, on en fait la qualification juridique pour aboutir à une infraction correspondant à ces faits. L’on est en droit de se questionner aujourd’hui si la CRIEF n’est elle pas finalement un vil instrument contre les leaders politiques en vue. Légitime questionnement en effet, surtout au regard de l’illogique dans la sélection des dossiers.

Tenez! Le Président de l’Assemblée Nationale et son feu vice président ont été arrêtés et emprisonnés pour environ une somme de 1million 500 mille€. Pendant que l’ancien ministre des travaux publics se pavane tranquillement avec une ardoise de plusieurs centaines de millions d’euros signalée. Quant à l’ancien Premier Ministre, les guinéens dans leur ensemble attendent encore les faits qui lui sont reprochés. Le parquet spécial de la CRIEF a indiqué les infractions sans en citer préalablement les faits, qui pourtant devraient conduire à la qualification des dites infractions. Fait inédit, quand on sait que l’ordre de la procédure commence par les faits, dont la qualification devrait conduire à l’énoncé de l’infraction. Aussi, sous le régime du Général Lansana Conté l’on s’interroge sur le fait que ça soit seulement l’ancien Premier Ministre Cellou Dalein Diallo qui soit inquiété. Comme si le seul dossier qui intéresserait la CRIEF soit celui susceptible d’incriminer le leader de l’UFDG. L’on est en droit de se questionner si cette cour de répression des infractions économiques et financières n’est -elle finalement pas qu’un instrument contre les principaux leaders politiques.

Revenant sur notre sujet, je voudrais modestement rappeler que le Front Républicain que des camarades et moi avons créés et lancés en 2018, prône la refondation en Guinée. A ce jour, c’est la première et la seule formation qui propose un projet crédible de refondation qui repose sur une vision transformationnelle de l’État et de la Nation. Quant au secteur primaire, il est estimé à plus de 60 % de la population guinéenne. C’est là où nous pouvons réaliser le plein emploi, c’est encore là où nous pouvons faire de la croissance, c’est encore là que nous pourrons relancer l’économie réelle. Au nom des Camarades responsables du Front Républicain: Mohamed Sankhon, Cheick Marega, Cellou Diallo, Djélima Tata Sylla, Lamine Diallo, Brécus Doumbouya… nous disons que la refondation n’est pas un slogan, c’est un projet découlant d’une vision concertée.

Ensemble, soyons l’espoir !!

Kémoko CAMARA
Enseignant/Gestionnaire RSE
Porte-parole du Front Républicain



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