DIALOGUE, DIALOGUE, MAIS QUEL DIALOGUE, DANS QUEL CADRE ? S’INTERROGE MAÎTRE TRAORE

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L’expression « dialogue politique  » n’est pas inconnue des Guinéens puisque depuis 2010 et à la faveur de crises politiques plus ou moins aiguë, des acteurs politiques se sont parfois réunis autour de la table pour discuter de différents sujets. Même s’il faut admettre, d’ailleurs, que les recommandations de ces différents dialogues n’ont en général jamais été traduites par des actions concrètes sur le terrain. En fin de compte, le dialogue est perçu par de nombreux Guinéens comme un moyen pour les uns de rouler dans la farine les autres.

Du point de vue textuel, la Constitution de 2020 dispose en son article 58 alinéa 1 dispose que « le Premier ministre est responsable de la promotion du dialogue social et veille à l’application des accords avec les partenaires sociaux et les partis politiques ».

Certains ont voulu faire dire à ce texte ce qu’il n’a pas dit en soutenant que le Premier ministre est responsable du dialogue politique. Or, le texte est en effet très clair et confère deux rôles au Premier ministre :

– Il est responsable de la promotion du dialogue social;

– Il veille à l’application des accords avec les partenaires sociaux et les partis politiques ;

Aucune disposition de l’article 58 suscité n’attribue au Premier ministre la responsabilité du dialogue politique.

Que le Premier ministre soit responsable par exemple de la promotion du dialogue entre les partenaires sociaux (organisations syndicales, organisations patronales et, éventuellement, les pouvoirs publics dans le cadre d’un dialogue tripartite) dans le monde du travail, il n’y a rien d’anormal.

Mais il ne peut être le responsable du dialogue politique puisqu’il serait dans ce cas juge et partie.

En Guinée, l’opposition n’a pas généralement de conflits avec le parti au pouvoir mais avec les pouvoirs publics, le gouvernement.  Le chef de ce gouvernement ne pourrait être la personne la mieux indiquée pour conduire un dialogue politique.

La Constitution de 2020, sauf mauvaise lecture, ne reprend d’ailleurs pas les dispositions de l’article 58 de celle 2010 relative à la responsabilité du Premier ministre en matière de promotion du dialogue social.

C’est pourquoi, on peut se poser des questions sur la base juridique du décret n°031du 27 janvier 2021 portant création, fonctionnement et attributions du cadre permanent de dialogue social et politique. L’article 3 dudit décret indique que le cadre permanent de dialogue social et politique est présidé par le Premier ministre, chef du gouvernement. La composition de même de ce cadre de dialogue pose problème:

– Un représentant de la présidence de la République;

– Un représentant de l’Assemblée nationale;

– Deux représentants du Gouvernement ;

– Deux représentants de l’Opposition;

– Deux représentants de la Majorité ;

– Deux représentants de la Société civile ;

Une telle composition n’augure absolument rien de fiable dans le fonctionnement de ce cadre de dialogue. Le principe de la parité devrait être la ligne directrice dans la composition d’un tel organe. Pour la véritable opposition, siéger au sein du dialogue permanent de dialogue dans son schéma actuel, c’est se jeter tout simplement dans la gueule du loup.



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