Mort de Mamoudou Barry à Rouen : la question de la responsabilité pénale au cœur du dossier

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Evidemment, les proches de Mamoudou Barry, encore « meurtris », veulent qu’un procès ait lieu et « que justice soit rendue ». Il y a un peu plus d’un an, le 19 juillet 2019, ce jeune et brillant enseignant-chercheur en droit, Franco-Guinéen âgé de 31 ans, avait été roué de coups sous les yeux de sa femme, à Canteleu, près de Rouen (Seine-Maritime). Plongé dans un coma artificiel et transporté au CHU de Rouen, il était mort le lendemain.

Grâce aux témoignages et à la vidéosurveillance, son agresseur avait été retrouvé trois jours plus tard dans un hôtel de la banlieue rouennaise. Mais après examen médical, sa garde à vue avait été rapidement levée et l’homme envoyé en hôpital psychiatrique : il souffre de schizophrénie. Mis en examen fin janvier pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner », avec le caractère raciste de l’agression retenu comme circonstance aggravante, Damien Aktas, 30 ans, Français d’origine turque connu des services de police pour des délits mineurs, est toujours interné en unité spécialisée.

Tout l’enjeu de la procédure judiciaire consiste désormais à trancher la question de la responsabilité pénale de ce jeune homme sous curatelle. Son discernement au moment des faits était-il altéré, ce qui n’empêcherait pas un procès aux assises, ou bien aboli, ce qui le rendrait pénalement irresponsable ? Le parquet de Rouen se refuse pour l’heure à tout commentaire. « On peut attendre les conclusions des experts psychiatres en septembre ou en octobre », explique l’avocat parisien de l’épouse de la victime, Antoine Vey, ex-associé d’Eric Dupond-Moretti, désormais ministre de la justice.

Lors de sa première – et pour l’heure unique – audition en janvier par la juge d’instruction, dont Le Monde a pu consulter le procès-verbal, Damien Aktas a reconnu avoir porté les coups – « quatre, cinq, des coups de poing, des coups de pied » – mais sa version sur leur origine diffère de celle de plusieurs témoins.

Insultes et doigts d’honneur

Ce 19 juillet 2019 vers 20 h 20, soir de la finale de la Coupe d’Afrique des nations de football entre le Sénégal et l’Algérie qu’il compte regarder, Mamoudou Barry rentre chez lui en voiture avec son épouse. Selon cette dernière, alors que le véhicule passe doucement, fenêtres ouvertes, devant un arrêt de bus, Damien Aktas profère des insultes accompagnées de doigts d’honneur : « Vous les Noirs, vous êtes des fils de pute, on va vous niquer vos races. »

En attendant la suite de la procédure, le collectif justice pour Docteur Mamoudou Barry et plusieurs autres associations guinéennes et de lutte contre le racisme continuent à se battre sur le terrain. Il ya quelques jours, une manifestation a été organisée à Rouen à l’occasion de l’anniversaire de sa mort et une place a été baptisée à son nom

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