Ballon d’Or 2019: le cas « Mané », Ce que je pense de l’indignation d’une bonne partie de l’opinion « africaine ». Sayon Dambélé

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Ce lundi 02 décembre a été décerné le 64è Ballon d’Or de l’histoire au petit lutin argentin qui, au passage devient le recordman de cette prestigieuse distinction avec un sixième sacre personnel. Au-delà de la consécration d’un génie, consensuel sur le talent pur, jamais une attribution n’a suscité autant d’indignation de la part d’une bonne partie du public « africain » ou « afrofriendly ». Celui-ci crie au scandale voire à un certain racisme en considérant que le trophée devait échoir au fantastique attaquant sénégalais de Liverpool, Sadio Mané (27 ans). Voici en quatre points, ce que j’en pense en rappelant certaines considérations nécessaires à la compréhension du football actuel, produit de la mondialisation :

1. D’abord, il faut rappeler ce qu’est le Ballon d’Or France Football. Il s’agit d’une récompense créée en 1956 par des journalistes français du magazine France Foot. Ce prix à l’origine était réservé aux footballeurs européens jouant en Europe jusqu’en 1995 où il sera désormais ouvert à tout joueur, quelle que soit la nationalité, évoluant dans un championnat européen. C’est ainsi que George Weah l’eut. Pendant six ans (2006-2010) il devient Fifa-Ballon d’Or – en fusionnant avec le titre de meilleur joueur Fifa de l’année –et depuis 2007, il s’est « internationalisé » car désormais il est ouvert à tous sans distinction de nationalité, ni de championnat.

2. Qu’est ce qui a prévalu pour ce trophée-ci et quels en ont été les critères ? Le vote était ouvert à 180 pays représentés chacun par un journaliste qui devait voter selon trois critères : performances individuelles et collectives/Classe du joueur (talent et fair-play)/Carrière. Au final, quatre pays n’ont pas pu remettre le suffrage à temps (pour votre info, c’étaient des pays africains selon le patron de France Football).

3. La troisième considération du texte porte sur le procès en racisme qu’on entend depuis quelque temps. Je le dis tout de suite, je ne souscris pas à une telle théorie du complot. Le scrutin est dur pour Mané, au vu de ce qu’il a réalisé et surtout de son début de saison canon, mais il faut comprendre toutes les dimensions de ce trophée « mondialisé » où d’autres ingrédients entrent en ligne de compte. Vu le nombre de votants, il est possible que beaucoup de « petits » pays soient moins sensibles au talent du sénégalais par rapport à un Messi ou à un Ronaldo car ces derniers sont des produits marketing « mondovisio » au-delà de leur personnalité iconique qui rend certains votes irrationnels. C’est pourquoi par exemple j’explique la troisième place de Cristiano Ronaldo qui, aussi monstrueux qu’il est, n’a pas fait beaucoup plus que Mané. Au contraire. Arrêtons d’être « afrocentrés », tout le monde ne voit pas le talentueux Sadio Mané de la même manière. Tout le monde n’a pas Canal Horizons, n’écoute pas Habib Bèye ou regarde Talents d’Afrique. L’analyse doit intégrer aussi la dimension de la mondialisation mais aussi le caractère irrationnel du foot qui, quelquefois, frise une certaine injustice de fait. Ce n’est pas un coup préparé dans des salons feutrés à la Fifa ou à France Foot pour discriminer tel ou tel athlète pour je ne sais quelle raison. D’ailleurs, je vous fais un scoop : le représentant de la France a voté….. Sadio Mané. Avec cette info, vous faites moins le malin (ceux qui crient au complot « français »)… ☺ ! On peut comprendre le sentiment d’injustice sans nécessairement l’expliquer par une cabale ourdie contre le sénégalais en raison de sa couleur de peau. Une dernière info, l’Afrique est le continent le plus représenté dans le top 10 du classement après l’Europe avec trois représentants (Mané, Salah et Mahrez) devant l’Amérique du Sud et l’Asie. Mahrez, qui n’a quasiment pas joué de la saison car remplaçant à City finit devant De Jong, Sterling, Hazard et De Bryne…Ce classement s’explique par son titre continental. C’est une raison supplémentaire, si besoin, que les gens ne sont pas nécessairement Ce que je pense de l’indignation d’une bonne partie de l’opinion « africaine »

4. Autre contre-vérité à déconstruire, c’est celle qui voudrait passer penser que même des Africains n’auraient pas voté pour Mané. Factuellement c’est faux. Sur le continent africain, Sadio Mané se classe 2è derrière certes Messi mais celui-ci ne le devance que de 17 points sur une cinquante de votants (187 contre 177). Qui sait si les quatre pays africains à la traîne avaient pu faire valider à temps leur vote si Mané n’allait pas devancer Léo sur notre continent ? J’en conviens que cela n’aurait pas changé le sort de Mané. Hermétiques à ce qui se passe sur notre continent.

Sayon Dambélé



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