Un conte pour une nuit: La Bataille de Kirina ou le Triomphe de Soundjata Keïta (Acte 1)

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La bataille de krina fut l’un des faits marquants des évènements du XIII siècle en Afrique occidentale. De nos jours il a une grande portée historique mais aussi culturelle. Cette bataille a permis la naissance de l’une des plus vielle constitution au monde (La charte de kouroukanfouga)

Chaque homme a sa terre: s’il est dit que ton destin doit s’accomplir en tel pays, les hommes n’y peuvent rien. Mansa Tounkara ne pouvait pas retenir Soundjata car le destin du fils de Sogolon était lié à celui du Manding. Ni la jalousie d’une marâtre, ni sa méchanceté, n’ont pu modifier un instant le cours du grand destin. Le serpent, ennemi de l’homme, n’a pas longue vie, mais le serpent qui vit caché mourra vieux à coup sûr. Djata était de taille maintenant à affronter ses ennemis. A dix-huit ans il avait la majesté du lion et la force du buffle. Sa voix était l’autorité, ses yeux étaient des braises ardentes; ses bras étaient de fer: il  était l’homme du pouvoir

C’était en 1235, Soudjanta et sa puissante armée s’apprêtèrent  quelques jours à Sibi ; la route du Manding était libre, mais Souamoro n’était pas vaincu. Le roi de Sosso avait levé une puissante armée, ses sofas se comptaient par milliers ; il avait levé des contingents dans les pays qu’il contrôlait et s’apprêtait à fondre à nouveau sur le Manding.

Sogolon-Djata avait minutieusement fait ses préparatifs à sibi ; il avait maintenant suffisamment de sofas pour affronter Soumaoro dans une plaine découverte ; mais il ne s’agissait pas d’avoir beaucoup de guerriers ; pour vaincre Soumaoro, il fallait d’abord détruire sa puissance magique. A sibi, Soundjata se décida à consulter les devins ; les plus célèbrent du Manding étaient là.

Sur leur conseil, Djata devait immoler cent taureaux blancs, cent béliers blancs et cent coqs blancs. C’est au milieu de ces hécatombes qu’on vint annoncer à Soundjata que sa sœur Nana Triban et Balla fasseké ayant pu s’échapper de Sosso étaient arrivés. Alors Soundjata dit à Tabon Wana ; « si ma sœur et Balla ont pu s’échapper de Sosso, Soumaoro a perdu la bataille. »

Quittant les lieux des sacrifices, Soundjata rentra à Sibi et rencontra sa sœur et son griot. Après de nombreuses salutations, Soundjata demanda aux fugitifs de raconter comment ils avaient pu tromper la vigilance d’un roi tel que Soumaoro… Quand tu quittas le Manding, mon frère m’envoya de force à Sosso pour être l’épouse de Soumaoro dont il avait grand peur. Je pleurai beaucoup les premiers jours, mais quand j’ai vu que tout n’était peut-être pas perdu, je me résignai momentanément. Je devins aimable avec Soumaoro et je fus l’élue parmi ses nombreuses épouses… je savais le flatter et le rendre jaloux. Bientôt je devins sa confidente… j’étais en rapport constant avec Balla Fasseké, chacun de nous voulant percer le mystère de la puissance magique de Soumaoro. Une nuit j’attaquai à fond et je dis à Soumaoro « dis-moi, ô toi que les rois nomment en tremblant, dis-moi Soumaoro, es-tu  un homme comme les autres ? Es-tu l’égal des génies qui protègent les humains ? Nul ne eut soutenir l’éclat de tes yeux, ton bras a la force de dix bras ; dis-moi, ô toi, roi des rois, dis-moi quel génie te protège afin que je l’adore  moi aussi. » Ces paroles le remplirent d’orgueil, il me venta lui-même la puissance de son « tana », cette nuit même, il m’introduisit dans sa chambre magique et me dit tout.

« Alors je redoublai d’ardeur à me montrer fidèle à sa cause, je semblai plus accablée que lui ; c’est même lui qui en venait à me dire de prendre courage et rien n’était encore perdu. Pendant ce temps, en accord avec Balla fasseké, je préparais la fuite inévitable. Personne ne me surveillait plus dans l’enceinte royale dont je connaissais les moindres détours. Et une nuit que Soumaoro était absent, je partis de la formidable tour, balla Fasseké m’attendait à la porte dont j’avais la clef. C’est ainsi que nous avons quitté Sosso. »

Balla fasseké enchaina : « nous sommes accourus vers toi ; la nouvelle de victoire de Tabon me fit comprendre que le lion a brisé ses chaines. O fils de Sogolon, je suis la parole et toi l’action, maintenant ton destin commence. »

Soundjata était très heureux de retrouver sa sœur et son griot ; il avait maintenant le chantre qui, par sa parole, devait perpétuer sa mémoire. Il n’y aurait pas de héros si les actions étaient condamnées à l’oubli des hommes, car nous agissons pour soulever l’admiration de ceux qui vivent, et provoquer la vénération de ceux qui doivent venir…

Soundjata vint établir son camp à Dayala, dans la vallée du Djoliba ; c’était lui maintenant qui barrait la route du sud à Soumaoro kanté. Soundjata et Soumaoro s’étaient battus jusque-là sans déclaration de guerre ; on ne fait pas la guerre sans dire pourquoi on la fait. Ceux qui se battent doivent au préalable faire une déclaration des griefs ; de même que le sorcier ne doit pas attaquer quelqu’un  sans lui reprocher quelque chose, de même un roi ne doit pas se battre  sans dire pourquoi il prend les armes.

Soumaoro savait que S’avança jusqu’à Krina, près du village de Dayala sur le Djoliba, et décida d’affirmer ses droits avant d’engager le combat. Soumaoro savait que Soundjata était aussi un sorcier…

Soundjata, de sa voix puissante, cria : « An gnewa » ; l’ordre fut répété de tribu en tribu et l’armée se mit en marche. Soumaoro se tenait à droite avec cavalerie.

Djata et sa  cavalerie chargèrent avec fougue, ils furent arrêtés  par les cavaliers de Diaghan et une lutte à mort s’engagea. Tabon Wana et les archers déployèrent leurs rangs vers les collines, la bataille se généralisa dans toute la plaine tandis qu’un soleil implacable montait dans le ciel…

Au point du jour, Fakoli vint reveiller Djata pour lui dire que Soumaoro avait commencé à sortir ses sofas de kirina. Le fils de Sogolon parut, habillé en roi chasseur : il portait  un pantalon collant de couleur ocre, il donna ordre de disposre les sofas en travers de la plaine ; pendant que les chefs s’affairaient, manding Bory et Nana Triban  entrèrent sous la tente de Djata. Frère dis manding Bory as-tu préparé l’arc ?

-Oui, repondit Djata, regarde… Il décrocha son arc du mur et la flèche fatale. Ce n’était point une flèche de fer. C’était du bois avec au bout un ergot de coq blanc. L’ergo de coq de coq était le tana de  de Soumaoro, secret que Nana triban avait su arracher au roi Sosso

Frère, dit nana riban Soumaoro sait maintenant que je me suis enfuie de Sosso, tache de l’approcher car il te fuira tout au long de la bataille.

Ces paroles de Nana Triban laissèrent Djata inquiet, mais Balla Fasseké, qui venait de rentrer sous la tente, dit à Soundjata que le devin avait vu en songe la fin de Souamoro

Acte II dans nos prochaines publications

 Leçon de morale : Qui veut voyager loin, ménage bien sa monture. Et surtout il ne faut jamais sous-estimer son adversaire. C’est la première erreur vers la défaite.

Djibril Tamsir Niane : L’épopée Mandingue



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