J’ai appris que vous avez l’intention de faire une grève de la faim. Aussi, J’ai remarqué deux types de réactions :
D’une part, il y a ceux qui tournent en dérision votre projet par gout de l’humour, certainement parce qu’ils sont pessimistes quant à l’efficacité de votre action face à un gouvernement qui n’a pas un gramme de pitié pour son peuple.
D’autre part, il y a ceux qui se moquent de vous par ignorance des méthodes non-violentes de résistance, parce que vivant au milieu d’affamés, ils jugent votre projet élitiste, aristocratique. A ces derniers, je réponds que de tout temps, le sens du sacrifice, de la privation, de la renonciation, ont toujours été le fait de personnes ordinaires, inconnues, modestes, proches du peuple ou se sentant proches de lui.
Quant à moi, pour manifester mon soutien, mon respect, à votre cause, à votre combat, permettez-moi de vous conter l’histoire d’un grand Indien, peut être que cette histoire vous réconfortera dans votre projet. Il s’appelle ANNA HAZARE.
L’histoire que je raconte ici est puisée intégralement du livre de SRDJA POPOVIC « Comment faire tomber une dictature » pages 290 à 296.
HAZARE est un Indien, un non violent convaincu, disciple spirituel de GANDHI. Ce Viel homme décida en 2011, de s’attaquer à la corruption devenue un véritable cancer en Inde.
En effet, selon Transparency International, plus de 62% des ménages indiens reconnaissaient en 2005 avoir versé des pots-de-vin pour bénéficier des services publics de base.
Ainsi, voulant mettre un terme à cette corruption généralisée, quotidienne, HAZARE exigea du gouvernement, d’une part, des sanctions sévères contre les responsables jugés coupables de corruption, d’autre part, la mise en place par le vote d’une loi par le parlement d’un système d’ombudsmans locaux(médiateurs locaux) capables d’agir rapidement au nom des citoyens. Sans surprise, le gouvernement refusa le plan de HAZARE avec mépris.
Le 5 Avril 2011, HAZARE commença une grève de la faim avec cette déclaration faite devant la presse « Je jeunerai jusqu’à ce que la loi anticorruption soit passée ».
Des centaines de personnes se joignirent à HAZARE dans son jeune et des centaines de milliers d’Indiens envoyèrent des tweets et postèrent des messages de soutien sur Facebook. Les célébrités indiennes, les stars de Bollywood, les joueurs de Cricket, entrèrent dans la bataille de HAZARE. Jour après jour, des dizaines de milliers de soutiens de HAZARE affluèrent dans toutes les grandes villes de l’Inde.
Cinq jours plus tard, sous la pression populaire, le gouvernement déposa les armes, s’engageant de faire adopter la loi exigée par HAZARE.
HAZARE annonça sa victoire, mais comme il n’était pas bête comme l’opposition guinéenne, il savait que gagner une bataille n’était pas gagner une guerre. Conscient de cela, il maintint la pression contre le gouvernement en déclarant « La vraie bataille commence maintenant, dit-il à ses supporteurs. Nous avons un long combat devant nous pour mettre au point la nouvelle législation. En cinq jours, nous avons montré au monde que nous étions unis pour la cause de la nation. La présence de jeunes dans ce mouvement est un signe d’espoir »
HAZARE eut raison de se méfier de la capitulation du gouvernement en maintenant la pression malgré une première victoire. En effet, quelques mois plus tard, le gouvernement indien soumit une version édulcorée, atténuée, dénaturée de la loi exigée par HAZARE. Immédiatement, HAZARE protesta vivement en indiquant qu’il s’agissait d’ « une cruelle plaisanterie ».
Ainsi, le gouvernement indien manifesta sa vraie nature qui est la même pour tous les gouvernements à travers le monde, à savoir cette volonté de toujours tromper le peuple, à mépriser le peuple, chercher à gagner du temps pour rebondir.
Anna HAZARE, face à cette trahison, promit une nouvelle grève de la faim, cette fois jusqu’à la mort si nécessaire. En quelques heures, des dizaines de milliers de gens envoyèrent des fax au gouvernement pour soutenir l’appel de HAZARE. A Mumbai, les taxis firent une journée de grève en solidarité avec lui. Taxis et Mabana de Conakry, observez une journée de grève en soutien à Faya MILLIMONO, baptisez cette journée « LA JOURNÉE MILLIMONO »
Avant même que HAZARE ait pu commencer sa grève de la faim, il fut arrêté sous l’inculpation de rassemblements non autorisés et mis en prison.
De sa cellule, il entama sa grève, il recueillit un soutien si massif, que le gouvernement fut contraint à le libérer en quelques heures. Mais il refusa de quitter sa cellule si on ne l’autorisait pas à poursuivre sa grève dans les lieux publics qu’il avait choisis auparavant à cet effet. Quelques jours plus tard, il gagna à nouveau, et fut escorté à l’endroit qu’il avait choisi pour poursuivre son jeune.
En le voyant maigrir à vue d’œil, les milliers de gens venus le soutenir ne purent qu’être frappés par la contradiction entre son corps affaibli et la puissance de sa résolution, de sa détermination.
Partout en Inde, des jeunes se mirent à porter le topi, le calot blanc traditionnel qui était la signature de HAZARE.
Douze jours après le début de sa grève, ayant perdu près de 8 kilos, déshydraté et frêle, HAZARE fut informé que le gouvernement capitulait une fois encore et qu’il allait revoir la loi comme il le demandait.
Assis sur une chaise, une immense banderole frappée du visage de GANDHI derrière lui, HAZARE déclara sa victoire finale en ces termes « J’estime que c’est la victoire du pays tout entier »
Monsieur MILLIMONO, vous raconter cette histoire, la faire connaitre à des milliers de compatriotes, est ma façon de vous soutenir. C’est peu, très peu même, mais c’est ce que je peux, c’est ma façon.
Bon courage digne fils de la GUINÉE.