CHARTE GUINÉENNE DE LA TRANSITION/ QUESTION DE LA DURÉE : petit clin d’oeil matinal

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Dans le constitutionalisme africain, les textes qui régissent les transitions sont qualifiés de « petites constitutions « .
Sur le plan formel, ils peuvent être appelés :

➢ « Charte de la transition »,
➢ « Accord politique »,
➢ « Charte constitutionnelle »,
➢ « Constitution de la transition ».

Le texte qui vient d’être adopté par le CNRD est donc effectivement une constitution de la transition, en dépit du nom charte qui ne change substantiellement rien à cette réalité.

  1. SUR LA DURÉE DE LA TRANSITION,

Les commentateurs et analystes qui ont lu et, en général, trouvé le texte constitutionnel digne d’intérêt, ont regretté l’inexistence de prescription afférente à la durée de la transition. Cet étonnement appelle quelques très brefs commentaires :

SUR LA COHÉRENCE AVEC LE COMMUNIQUÉ DU CNRD DU 5 SEPTEMBRE

  1. Le choix d’une définition consensuelle relève non seulement de la cohérence au regard de l’esprit du communiqué du 5 septembre mais représente également un facteur de légitimation des actes du CNRD.

Définir unilatéralement la durée de la transition ne se concilie pas avec l’esprit du principe de la confiance mutuelle devant présider à la conduite de cette transition. Elle s’apparenterait à un acte autoritaire générant une probabilité élevée de défiance. Or, on en a pas besoin. Cela n’est pas dans l’intérêt général.

  1. Sur les plans techniques et politiques, le constitutionalisme africain enseigne, à titre empirique, que les calendriers des transitions peuvent faire l’objet d’amenagements (de reports) qui peuvent parfois être considérés par des acteurs comme nécessaires, pour prendre en compte telle ou telle contingence imprévue.

Ainsi, techniquement, prévoir la durée de la transition reviendrait à admettre tacitement le principe des révisions plurielles dictées par la modification de la prescription constitutionnelle consacrant la durée. Ainsi, à titre d’exemple, si après la lecture du communiqué d’hier, les autres acteurs de la transition (y compris politiques) rejetaient la durée fixée par le CNRD, il aurait déjà fallu imaginer une première révision en supposant que le CNRD se révèle coopératif comme jusque-là. Or, une détermination concertée de la durée nous l’évite.

Ensuite, quoiqu’il s’agisse d’une hypothèse improbable, si le CNRD devait écouter les organisations africaines (U.A, CEDEAO etc.), prenons l’hypothèse qu’à l’issue de la définition d’un calendrier accepté par les autres acteurs, ces organisations recommandent un aménagement raisonnable accepté de tous, on procéderait de nouveau à une révision. De même, à supposer même que les acteurs guinéens ne soient entendus, si au cours de la transition, d’autres contraintes imprévues advenaient et rendaient impossible le respect du calendrier de base, on procèderait encore à une nouvelle révision. Ainsi, la seule et même disposition ferait l’objet d’une pluralité de révision, sans compter les révisions éventuelles qui toucheraient d’autres dispositions.

En définitive, la capacité à respecter les textes dépend aussi du choix des techniques juridiques.

Jean Paul KOTEMBEDOUNO



Toronto, Ontario, Canada