L’AN 72 de N’KO : « la création de l’alphabet N’KO est une véritable indépendance culturelle et scientifique pour les peuples d’Afrique occidentale » Siaka Barry

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Le 14 avril 1949, Solomana Kanté, un jeune marchand de colas, né en 1922 dans la petite bourgade de Kolöni (en périphérie de Kankan), révolté après la lecture d’un journaliste libanais traitant les africains d’aliénés culturels, pour n’avoir jamais pu produire dans leur histoire aucun savoir graphologique propre, mettait au point un système d’écriture révolutionnaire qu’il appellera le « N’KO ».

L’écriture N’KO répondait à sa création, à un souci majeur : la transcription des langues africaines (à bases plutôt phonétiques) là où les alphabets étrangers (notamment latin et arabe) montraient leurs limites.

Plus que les indépendances politiques chèrement acquises (parfois dans le sang) par nos pères fondateurs, la création de l’alphabet N’KO peut être considérée comme une véritable indépendance culturelle et scientifique pour les peuples d’Afrique occidentale.

Dans cet ordre d’idée, Kanté Solomana a droit à la même gloire que ces pères fondateurs et au même hommage que les grands révolutionnaires panafricanistes, dans la lignée des Kwamé Nkrumah, Ahmed Sékou Touré, Patrice Lumumba, Modibo Kéita, etc…

Il constitue avec Cheick Anta Diop, l’une des plus grandes figures de la renaissance scientifique africaine.

De 1949 à ce jour, le N’KO a résisté à tous les obstacles du colonialisme culturel qui infantilise toujours l’Afrique à travers une élite intellectuelle complexée et acculturée. Il s’est frayé tout seul son chemin sans aucun soutien des pouvoirs publics et étatiques, parfois dans un environnement d’hostilité et d’incompréhension. 

Mon propre père, Elhadj Bangaly Barry, qui fut avec son meilleur ami (Mamadi Bérété de Yarakouda) l’un des premiers disciples de Solomana Kanté dans son périple à Bouaké (Côte d’Ivoire), me disait souvent que l’une des plus grandes appréhensions du savant, était de voir un jour son œuvre enterrée par nos pseudo-intellectuels tarés et complexés, encouragés par le néocolonialisme.

Avec le rejet en 2019, du projet de loi portant valorisation de l’alphabet Nko dans le système éducatif guinéen, par l’Assemblée nationale, j’ai compris que cette crainte du vieux savant était bien fondée.

Kanté Solomana meurt le 23 novembre 1987, laissant derrière lui plus de 180 œuvres écrites et variées, allant de la Théologie à l’histoire, de la sociologie à la médecine, des mathématiques à la chimie, de la philosophie à l’art… une véritable bibliothèque en somme.

Au moment où le standard mondial UNICODE, à travers l’initiative BABEL de l’UNESCO a adopté le N’ko en 2004, il aurait été judicieux, que l’état guinéen se penche désormais sur la problématique de nos langues nationales, cela même au prix d’un travail d’harmonisation entre les alphabets N’KO, Adlam, Koré-sèbèli et Loma, afin qu’à l’instar de l’alphabet amharique, ils puissent être un vecteur d’unité culturelle et scientifique pour notre pays.

BONNE FÊTE À L’ALPHABET N’KO !!!



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