« il faut éviter de manipuler les textes juridiques, Le droit est très simple lorsqu’il ne comporte pas de coloration politique » Par Maître Traoré

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Les juristes qui s’appuient sur la notion de non- retroactivité de la loi nouvelle pour appuyer leur idée saugrenue de « compteurs remis à zéro » doivent avoir le courage pour ne pas dire l’honnêteté de reconnaître que la règle de la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux n’est pas nouvelle. Elle figure en bonne place dans la Constitution de 2010. Dès lors, on ne peut parler de non-retroactivité de la loi nouvelle puisqu’il n’existe pas justement de loi nouvelle. Le droit est très simple lorsqu’il ne comporte pas de coloration politique.

Si le Pouvoir veut faire un forcing pour obtenir un troisième voire un énième mandat, il peut bien le faire puisqu’il dispose de toutes les ressources nécessaires (argent, forces de défense et de sécurité…) pour arriver à ses fins.

Mais de grâce, qu’on ne perturbe pas les étudiants en droit et plus généralement les juristes en galvaudant certaines notions juridiques dont la clarté exclut toute gymnastique intellectuelle.

En jouant sur les mots et en vidant de leur substance des notions de droit, on risque de créer des précédents dangereux. Sur le plan politique en particulier, toutes les fois qu’un président en fonction voudrait désormais  éluder la règle de la limitation du nombre de mandats, il pourrait se faire « tailler » un texte qu’il appellera  » nouvelle constitution » pour invoquer par la suite la règle de non- rétroactivité de la loi nouvelle.

Supposons que Monsieur Alpha Condé soit élu le 18 octobre prochain, il aurait un mandat de six ans renouvelable. Et rien ne dit qu’il ne pourrait pas briguer un deuxième mandat en 2026 puisqu’il lui faudra encore terminer les chantiers qu’il aura ouverts pendant les six années de son premier mandat.  » Wo alu a kha a kha wali ranyön » disent ses partisans.

S’il était arrivé au pouvoir plus jeune qu’il ne l’était en 2010, son âge lui aurait permis de briguer deux autres mandats d’une cinquième République. Il lui suffirait pour cela de changer encore de Constitution pour  « remettre les compteurs à zéro » en invoquant la même règle c’est-à-dire la non-retroactivité de la loi nouvelle. Et puisqu’il sera amené pendant tout le temps qu’il sera président à ouvrir de nouveaux chantiers qu’il lui faudra achever, on ne pourrait s’acheminer que vers une présidence à vie.

La question est de savoir à quel moment, un président de la République pourrait dire  » J’ai achevé tous les chantiers que j’ai commencés.

C’est pourquoi, il faut éviter de manipuler les textes juridiques à des fins autres que celles auxquelles ils ne sont pas destinés.



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