Guinée : Quand le pouvoir crée l’opposition

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A l’origine, l’opposition est l’ensemble des partis politiques ou les mouvements n’appartenant pas à la majorité parlementaire et donc s’y opposant.

De ce fait, l’opposition permet de renouveler le personnel politique : lorsque la majorité perd le pouvoir, une nouvelle génération d’hommes politiques peut trouver une place de choix dans l’opposition, et se préparer ainsi à assumer des fonctions importantes à l’occasion d’une victoire future. Le rôle de l’opposition est donc essentiel en démocratie. C’est pourquoi certains pays ont conféré un véritable statut à l’opposition. Ainsi, la Grande-Bretagne a érigé la fonction de chef de l’opposition en fonction officielle (« chef de l’opposition à Sa Majesté »), à la tête d’un cabinet fantôme (shadow cabinet).

En dressant un regard attentif sur le paysage sociopolitique de la Guinée, on a du mal à distinguer « opposants et gouvernants » tant les mutations ont été profondes ces dernières années. Bref, des ambivalents politiques

 

À l’avènement de la démocratie en Guinée dans les années 90, les pionniers de l’opposition guinéenne venaient certes de divers horizons socioprofessionnels, mais ils avaient tous en commun cette profonde conviction d’appartenir à un mouvement politique qui ne voulait pas du tout s’associer à un régime jugé inapte à bien gérer le pays.

C’est ainsi que Feu Bah Mamadou, Siradio Diallo, Jean Marie Doré … ont combattu le régime du Feu président Conté en refusant toute forme de collaboration avec ce dernier. Ils ont tenu bon dans un environnement  politique difficile avec tous les risques que cela pouvait engendrer. D’ailleurs, certains d’entre eux n’ont pas pu éviter la prison. Bah Mamadou et Jean Marie Doré  ou encore Alpha Condé avaient été emprisonnés sous le régime de Conté à cause de leurs convictions. Qu’à cela ne tienne, ils ont tenu bon durant tout le long mandat du feu général président.

Après cette première vague d’opposants, on a assisté à l’arrivée d’une nouvelle génération d’opposants qui se distingue profondément de son ainé : c’est l’opposition issue du pouvoir : dorénavant, ces nouveaux leaders ne viennent pas en politique par conviction, mais plutôt après avoir été au pouvoir : Ils ont géré les affaires de l’Etat, ils ont été démis de leurs fonctions pour une raison ou une autre et soudainement comme dans un rêve réapparait en eux la conviction politique. Dans cette longue liste d’opposants dont la conviction politique est née après avoir géré les affaires de l’Etat, vous verrez l’actuel premier ministre Mr Ibrahima kassory Fofana du GPT, Mr Cellou Dalein Diallo de l’UFDG, Sidya Touré de l’UFR, Lansana Kouyaté du PEDN…

Malheureusement en Guinée, le renouvellement de la classe politique n’existe pas. L’opposition et la majorité gouvernementale sont gérées par les mêmes personnes, et cela depuis plusieurs années. Par exemple Jean marc Telliano a commencé à critiquer  Alpha Condé que lorsqu’il avait été débarqué du gouvernement de celui-ci. Autrefois porte-parole de l’opposition républicaine, Aboubacar Sylla assume le même rôle dans le nouveau gouvernement du même président Alpha Condé qu’il critiquait il y a juste quelques jours : Où est la conviction ?

Dans cette ambiance de pérégrination politique sans fin ou l’intérêt personnel ou la carrière professionnelle prend le dessus sur la conviction et l’intérêt national, le peuple continue de végéter dans la médiocrité la plus absolue à la recherche de son sauveur capable de porter haut ses aspirations.

Pour l’instant, tout le regard est tourné vers les élections présidentielles de 2020 qui s’annoncent  très décisives pour la jeune démocratie guinéenne. Comme le disait il y a quelques jours un possible futur leader politique « En 2020 toutes les voies sont ouvertes … ». Cette simple phrase résume toute la complexité de la situation socio-économique du pays.

VIVE LA DÉMOCRATIE VIVE LA GUINÉE

Lamine Elmy Soumah Angleterre



Correspondant en Angleterre