Lettre ouverte à Monsieur le Président de La République de Guinée Pr. Alpha CONDÉ

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Monsieur le Président,

En  vous saluant de bonnes paroles, nous avons décidé de vous adresser cette lettre ouverte en tant que simples citoyens en cette période clé de la vie de notre pays. L’objet de la lettre,  c’est de vous faire part de notre avis sur l’actualité brûlante par rapport  au projet de  proposition de nouvelle constitution.

Monsieur le président,

Peut-être que vous liriez cette lettre  ou vous n’en liriez pas. Peut-être que l’un  de vos proches la lira j’en suis sûr. En  tout état de cause, je prie qu’elle  vous parvient, afin que vous exploriez aussi les avis de simples citoyens, au-delà des propos de vos conseillers.

Sans tomber dans un accès de langage hypocrite, à l’instar des politiciens qui prétendent souvent parler au nom du peuple de Guinée, même s’ils parlent au nom des intérêts égoïstes et égocentristes, j’écris au nom  de tous ceux qui ont adhéré et adhéreront à la pensée exprimée dans la présente lettre. Mais déjà, beaucoup de guinéens, des femmes et des hommes de toutes les catégories de notre société, que nous avons écoutés et avec qui nous avons parlés, partagent nos opinions.

Votre engagement politique est un model

Monsieur le Président,

Les quarante ans d’engagement politique  caractérisés par votre constante, n’auront pas raison si en ces derniers moments de votre deuxième mandat, vous ne preniez pas les bonnes décisions qui définiront les destinées meilleures de la Guinée, et qui feront de vous et de votre progéniture, l’objet d’une reconnaissance honorable, permanente et perpétuelle de la nation, de l’Afrique et du monde. Vous  aviez incarné dans la lutte  le passé politique de la Guinée. À présent vous administrez  les affaires de notre pays, votre leadership tracera un lendemain meilleur pour votre peuple comme ce fut le cas de  Nelson Mandela, auquel d’ailleurs vous vous inspiriez au début de votre tout premier mandat.

L’épineux problème de projet de nouvelle constitution

Aujourd’hui, parlant de l’épineux problème de troisième mandat, de révision constitutionnelle ou de la proposions de projet de nouvelle constitution, débat qui se retrouve au premier rang du panorama médiatique et politique actuelle, vous êtes peut être tenté ou déterminé à prolonger votre mandat. Vous êtes au  bord des trois extrêmes, d’une part votre envie  peut être, d’être candidat au-delà de 2020, d’autre part vos proches  qui vous séduisent à un projet de nouvelle constitution,  et l’opposions de certains de vos compatriotes face à  tout projet constitutionnel. Dans cette situation que devez-vous faire ?

L’argument politique et juridique de projet nouvelle constitution

Lors d’une émission radio que nous avions participé en 2014  ici à Conakry, le journaliste avait posé la question suivante à la fin de l’émission : « Si vous étiez auprès du Président  de la République comme conseiller que lui diriez-vous  »?  -« Je lui dirai de permettre l’alternance à la fin de ses mandats afin de rentrer dans l’histoire » pour répondre.

Monsieur le Président

Apres avoir écouté des citoyens, des juristes, des acteurs  politiques, ceux qui sont pour ou contre le projet de nouvelle constitution. Nous avons  lu des articles de presse, des tribunes… La dernière  en date c’est celle du Professeur « Zogbelemou » et d’un certain notre de ses confrères juristes qui appliquent  la contre-attaque à sa tribune.

 En analysant l’ensemble des argumentaires de ceux qui soutiennent le projet constitutionnel, nous les avons placés sous deux ordres :

Le premier ordre : Tant d’acteurs du monde  politique, juridique… propagent que l’intangibilité  constitutionnelle au niveau de l’article 27 vous empêche effectivement de briquer un troisième mandat, toute fois,  l’article 51 qui  vous donne le pouvoir de faire une   proposition de projet de nouvelle constitution, peut ouvrir la porte à une autre  candidature de votre part.

Nous opposons à cet argument, l’expression de la fibre patriotique de l’esprit d’intangibilité dont le peuple de Guinée s’est imprégné,  sur la forme de la limitation du mandat présidentiel  à deux consécutivement et non renouvelable. En effet, l’intangibilité constitutionnelle de l’article  27 de notre constitution  est née suite aux dérives autoritaires dans l’exercice du pouvoir étatique, et la non possibilité de toute alternance politique qui est pourtant la pierre angulaire de la démocratie moderne. Cet état de fait a, de par le passé entretenu des crises énormes et gravissimes. La modification ou changement de constitution est l’une des causes qui entretiennent  les fondements de la pauvreté de notre nation aujourd’hui. L’esprit donc d’intangibilité constitutionnelle doit demeurer même après l’adoption d’une nouvelle. Cet  esprit  est plus important que la loi elle-même.

C’est pourquoi,  même si le président offre un projet de nouvelle constitution, il ne pourra se représenter après deux mandats consécutifs. Dans le cas contraire, il peut être candidat à la fin d’une autre mandature qui n’est pas la sienne. Autrement dit,  un président ne doit être candidat à sa propre succession après deux mandats consécutifs,  et suite à l’adoption d’une nouvelle constitution. C’est cela  l’esprit républicain. 

Dans le contexte actuel, ne pas soutenir un troisième mandant mais défendre le projet de nouvelle constitution qui déboucherait à un autre mandat du Président en exercice du pouvoir, surtout à quelque mois  de l’expiration  de son deuxième quinquennat, est contradictoire. L’opportunité  de l’argument juridique du Professeur Zogblemou est à ce titre  assez peu crédible et  d’une conviction  moins honnête. 

Le deuxième ordre : Un certain nombre d’acteurs parlent de dernière chance pour le président  de parachever ses œuvres. Cette philosophie porte atteinte à la dignité de tout un peuple. Car l’idée est de dire, parmi les douze millions de guinéen, à part le Président de la République, il n’y a personne qui puisse être capable de présider aux destinées de la nation. Leurs arguments ne reposent en  réalité que  sur du  mensonge plutôt qu’une conviction d’expression de développement de la Guinée.

Ces Diffuseurs  d’idéologies du culte de la personnalité, d’un président fondateur, sont comparables à des personnes sauvées  d’un naufrage et qui s’aventurent encore sur la haute mer. Ne tirant pas  les leçons du passé, dont leurs actions furent nocives jusque à endormir la conscience populaire au temps du Président Lansana Conté.

Oui ! Ces gens qui sont ivres de leurs pulsions malsaines, sont les mêmes qui ont égaré complètement le Président Conté.

Monsieur le Président,

Pensez au « Coudeïsmse » et ses horreurs, et dont les guinéens ne se sont pas relevés totalement de ses méfaits dévastateurs.  Aujourd’hui encore, ces mêmes personnes inventent des slogans, sonnent la flûte de l’ethnocentrisme, dansent aux bruits du désordre, entretiennent la confusion, polluent la cité, engrangent de grands moyens  pour parvenir à leur fin.

Pourtant, chaque Guinéen devrait se ressaisir, proposer de bon projet pour ce pays, pour que la Guinée aussi s’érige en  modèle de développement. Exclure toute possibilité de renouveau et de changement historique à la tête de l’Etat, est une trahison de l’histoire de son pays.

Malheureusement, il y a toujours des personnes qui osent apporter des solutions malhonnêtes au problème de la Guinée, et même qui ne reculent pas devant le meurtre, mais leur fin sera conforme à leurs œuvres.

Propositions Monsieur le Président Pour une sortie de crise durable et pour parachever vos œuvres, nous vous proposons :

  • De déclarer publiquement votre envie de ne pas vous présenter à l’élection présidentielle à venir
  • De rajeunir les instances de votre partie et d’organiser  les primaires ouverts afin de choisir le candidat du RPG-ARC-EN à l’élection présidentielle à venir.

Ces propositions peuvent paraître simples, mais elles révèlent une grande profondeur dont d’autres partis politiques s’inspireront certainement si vous acceptiez de les appliquer.

Exhortation Monsieur le Président,

Pour finir,  un grand  écrivain Britannique Thomas Eliot disait ceux-ci « Dans un monde de fugitif, celui qui prend la direction opposée aura l’air d’un déserteur »

La Guinée ressemble de nos jours à un monde  de fugitif. Et chaque guinéen ressemble à un fugitif. Même vous, monsieur le président vous semblez être un  fugitif. Mais vous devez être un déserteur, une sorte de prise au vent. Un fugitif qui doit oser partir à contre courant, à la direction  opposée de toutes ces idéologies qui fleurissent par des manœuvres politiciennes. Et la direction opposée pour vous n’est pas un lieu. Mais le respect de l’article 27 de notre loi suprême  et le refus de projet de nouvelle constitution. C’est cela l’intérêt de votre peuple. C’est cela votre grandeur. Vous avez été élu par un peuple qui a tant souffert, vous devez être fidèle à l’alliance. L’adoption d’une nouvelle  constitution avec la tension qu’elle engendre actuellement, pourrait hypothéquer la paix nationale. Elle pourrait créer des crises à  ramification multiples dont la République de Guinée se relèverait difficilement. Construire un pays est difficile, mais le détruire est facile. Pensez à votre quarante ans de lutte, pensez aux femmes qui se lèvent chaque matin pour travailler, pensez aux étudiants, aux menuisiers, au enseignants, aux journalistes, pensez à votre peuple en un mot. La Guinée a besoin de vous honorer en tant qu’un ancien président. Vous avez fait de haute étude, vous vous êtes illustré dans la lutte politique pour  ce qui vous paraissait être bon, la défense de votre peuple. Qui pourrait comprendre la noblesse de votre combat, si vous décidiez d’être candidat au-delà de 2020 même par les moyens autorisés par la loi ? Le couronnement de votre lutte est là. Vous êtes un homme éclairé, avancé en âges et en sagesse. Discerner grandement les portes de l‘histoire qui vous sont ouvertes. Ne trahissez pas votre conviction. Vous êtes venu à l’aube de l’histoire avec des applaudissements et des honneurs, au crépuscule, ne partez pas avec des déshonneurs, pour vous permettre de rentrer par la porte, la porte de l’histoire des grands hommes. Que Dieu vous bénisse.

François d’Assise Haba Citoyen Guinéen



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